La Colline aux coquelicots
6.9
La Colline aux coquelicots

Long-métrage d'animation de Gorō Miyazaki (2011)

Goro Miyazaki avait voulu coller aux traits de son illustre père dans les Contes de Terremer pour un résultat plus que bancal, bien loin de la poésie originale de l'œuvre des studios Ghibli. Et il revient maintenant avec un second long métrage d'animation qui a ses imperfections mais dont on sent qu'il a évolué, qu'il est différent. Le créateur a appris de ses erreurs, pour notre plus grand bonheur.

Le Japon des années 60, se remet de la seconde guerre mondiale, sur fond de pop orientale et voit naître une génération de jeunes gens aussi cultivés qu'innovants, aussi drôles que touchants. Le récit est ancré dans la réalité et voit un couple d'étudiants se rapprocher de plus en plus, ne sachant pas exactement pourquoi au départ et puis, après enquête, sur leur passé, vont découvrir une incroyable vérité. La palette des couleurs sert magnifiquement un des meilleurs films d'animation de l'année et le retour des studios Ghibli en fanfare à un niveau équivalent à celui d'Arrietty.

Et si l'imaginaire fait défaut ici pour accepter une réalité historique, la poésie est, elle, omniprésente. Des écrits des étudiants dans leur journal au quartier latin et son charme inouï, aux personnalités et à l'histoire même, tout est fait de telle sorte que le spectateur soit transporté dans un nouveau monde, dans un nouveau pays, dont on rêve parfois, à la palette de couleurs impressionnantes et aux paysages fabuleux.

On adore voir ces jeunes gens évoluer, on se pose des questions sur leurs avenirs et surtout, on épouse à bras le corps leur cause : la défense de ce monument historique, empreinte des générations passées et lieu de culte du savoir et de l'évolution. On s'imagine facilement vivre au sein de cette communauté composée d'hurluberlus aux traits de caractère parfois un peu forcés – on est toujours dans une œuvre japonaise, ne l'oublions pas – mais où la justesse est toujours de rigueur. L'amour par exemple que ressentent les deux principaux protagonistes est tout en finesse, tout en regards, en attentions, en rencontres, fortuites pour la plupart. Les défis sont lancés, personnellement et pourtant, le spectateur ressent le besoin de grandir avec ces jeunes adultes.

Ainsi, pas un temps mort n'intervient, d'aventures en aventures, d'une banalité parfois déconcertante qui contraste avec la passion avec laquelle on les suit, les héros progressent et grandissent. Sorte de récit d'initiation sans aventures rocambolesques, le film permet à une histoire légère de prendre une ampleur qu'on n'ose pas imaginer de prime abord. Le tout servi par une animation non plus paresseuse comme dans les Contes de Terremer mais belle et bien travaillée de telle sorte que Goro donne réellement vie à ses personnages, qu'on imagine sorti tout droit d'une histoire de jeunesse de parents proches.

Seul bémol, s'il en est, cette histoire d'inceste quelque peu dispensable, gâchant un moment l'amour qu'on pourrait imaginer comme fraternel des deux personnages principaux. Mais qu'on se rassure, on n'est jamais mal à l'aise, bien au contraire. On découvre le Japon dans les années 60 débordant d'énergie, se reconstruisant rapidement, influencé il faut l'avouer par une présence américaine sur le territoire et on entend la musique d'époque, sorte de Feel good music déconcertante qu'on se surprend à chantonner à la fin de la projection.

Petit Goro a grandi donc, s'éloigne véritablement de son père en ne reprenant que la poésie inhérente aux différentes productions du studio pour intégrer tout ce qui en fait le charme dans la réalité. Tout ça, pour notre plus grand bonheur !
Carlit0
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le 30 mars 2012

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Carlit0

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