Pour apprendre quelques ficelles
Film à la limite du concept, La corde est construit sur des idées de mise en scène plus que sur un véritable fond. Ce faux plan séquence de 90 minutes est surtout l'occasion pour ce cher Alfred d'expérimenter de nouvelles trouvailles visuelles. Pour l'intrigue, elle est secondaire. Portée par un trio de personnages sans réelle épaisseur, elle peine à passionner. Seules quelques scènes bien pensées ( surtout celle de la servante débarrassant le coffre en plan fixe...) arrivent à susciter un véritable plaisir grâce une belle gestion du suspens.
Le couple homo avec son dominant arrogant et son dominé introverti ne tient pas la distance. Les acteurs surjouent, mais que faire d'autre quand le réalisateur tient plus à la place de sa caméra qu'à celle de ses comédiens. James Stewart assure le minimum syndical dans son rôle de prof distant et extralucide. La plupart des dialogues sont sans relief ou accouchent d'idées fumeuses faussement étonnantes. La révélation finale manque cruellement de peps et le plaidoyer de Steward tombe dans le gentil sermon populiste.
Mais il ne faut pas s'arrêter à cet aspect du film et vraiment se concentrer sur son noyau : la mise en scène. On reconnait là la patte de Hitchcock, cette maitrise de l'espace ( filmer un appartement tout en longueur), jouer avec le hors-champ, plan fixe pour appuyer un effet, suivre un dialogue avec une caméra "espionne" etc... Le vrai savoir faire de Alfred H est de toujours proposer quelque chose de nouveau sans tomber dans l'épate ou l'esthétisant.
Un film "figure de style" que tout cinéphile se doit d'expérimenter.