Entre deux Indiana Jones, Spielberg change complètement de registre et s'attaque à un roman "La couleur pourpre" (que je ne connais pas) d'Alice Walker pour en faire un film.

Le scénario évoque le destin de deux sœurs afro-américaines, Celie et Nettie, qui s'adorent et que la vie séparera. L'action commence au début du XXème siècle, dans une communauté campagnarde d'un état du sud des USA. La condition des jeunes filles y est pour le moins précaire entre les relations incestueuses avec le père, la naissance de deux enfants évacués aussitôt pour y être adoptés et leur valeur marchande qui leur vaut de finir mariées. En l'occurrence, Celie "tombe" sur un personnage veuf peu ragoutant qui cherche à se remarier non pas tant pour avoir une épouse (on comprend à demi-mot que la précédente fut tuée sous ses coups) que pour avoir une servante, pour ne pas dire esclave. Et Celie se soumet complètement jusqu'au jour où elle croise deux femmes, Sofia puis Shug qui ont su ou pu desserrer un peu leur carcan. La route sera longue…

Curieusement, on parle peu de racisme dans ce film à part la scène (un peu hors contexte) où Sofia gifle un blanc et écope de 8 ans de prison. En effet, l'action du film se passe au sein de communautés noires très patriarcales, centrées sur une religion très présente et finalement très fermées qui suffisent largement à la dramatisation de l'histoire et du destin des personnages.

Le ton de l'histoire est très mélodramatique, accentué par une voix off qui amène les éléments nécessaires à la compréhension de ce qui ne peut guère être montré de façon explicite …

Spoiler : Bien entendu comme souvent (pour ne pas dire toujours …) chez Spielberg, excellent humaniste, le destin de Celie, après avoir touché le fond pendant une bonne partie du film (et donc quelques décennies) finit par trouver la petite lueur d'espoir avant de terminer en scènes "sortez les mouchoirs, ça va être le moment". A noter que, personnellement, je m'étais aussi réjoui de la nouvelle bonne fortune de Celie avec l'œil un peu humide (Spielberg sait faire) ; une fausse note me semblant être la rédemption du mari de Celie qui a œuvré dans l'ombre pour le happy end. Cela ne me semble guère crédible, étant donné son passif. Et j'aurais bien vu le salopard bien puni.

Côté distribution, c'est Whoopy Goldberg qui tient le haut du pavé dans le rôle de Celie. Très convaincante dans son rôle de femme soumise qui a vite compris qu'elle est indispensable à la bonne marche de la maison. Quelques scènes jubilatoires montrant un service parfait même s'il n'est pas reconnu par le mari…

Justement le mari, c'est un magnifique Danny Glover dans le rôle d'un homme violent et profondément égoïste.

Deux seconds rôles à retenir c'est le personnage de Sofia interprété par Oprah Winfray qui se fera connaître ultérieurement à la télé. C'est aussi la chanteuse et actrice Margaret Avery dans le rôle de Shug en femme qui a su se libérer. Une très belle scène que la réconciliation avec son père, le pasteur, dans une folle ambiance gospel.

Justement, la musique est très belle, composée principalement par Quincy Jones avec quelques beaux blues …

Au final, c'est un beau film qui dégage pas mal d'émotion. Il se regarde sans ennui malgré certaines longueurs.

Spoiler : quand même, le happy end m'a semblé un peu trop appuyé …

JeanG55
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le 9 mai 2023

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JeanG55

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