Dans un manoir aux nombreux convives, il faut savoir être son propre Hercule Poirot pour y déceler le plus terrible des secrets dissimulé dans les ténèbres.


La Découverte d'un secret, bien qu'adapté d'un roman, possède une construction en cinq actes digne d'une pièce de théâtre qui aurait pu facilement n'en faire que trois. En effet, l'histoire tire en longueur notamment par des sous intrigues, certes sympathiques, mais qui n'apportent absolument rien au scénario. Nous pensons principalement à l'homme peureux et au petit marmiton qui, bien qu'offrant deux séquences de rêves fantasmagoriques, ne servent à rien à part donner une touche comique à un métrage qui n'en avait point besoin. Néanmoins, le plus dommageable avec cette intrigue est que toutes les ficelles tissant le fameux secret vendu par le titre français sont visibles dès les deux premiers actes. Pourtant, ces ficelles sont loin d'être friables et inintéressantes. Pour découvrir le secret du manoir, le comte Oetsch va se grimer en moine – un convive n'arrivant que quelques jours plus tard – pour soutirer des aveux auprès de la veuve de son frère décédé. Cette idée rocambolesque reste cependant judicieuse, renvoyant ainsi au fort attachement du frère pour la religion et au fort attachement de Murnau pour les faux semblants.

La place de la religion est particulière dans le film. Elle est principalement représenté par le dévouement soudain du frère. Ce changement est louable pourtant cette nouvelle dévotion se rapproche davantage de l'adoration abusive que d'une relation saine avec la foi. Le nez plongé dans les Saintes Écritures, il va alors éloigner sa femme, faisant émerger en elle de la frustration sexuelle qui lui donnera des idées noires, idées que son amant transformera en réalité en tuant son mari. Le comte, contrairement à son frère, va utiliser la religion à des fins personnelles voire immorales pour profiter du soudain repentir de celle qui ne souhaitait que le péché pour lui tirer les vers du nez. Finalement, pour la baronne le repentir ne l'aidera en aucun cas à se rallier du côté de Dieu car par deux fois elle n'aura trouvé la paix.

Les techniques utilisées par le comte sont malignes, le traitement qu'on lui accorde dans le manoir l'est tout autant. Il est victime d'une justice arbitraire par les convives, et surtout par le juge en retraite. La réalisation appuie lourdement sur son possible statut de meurtrier. Malgré l'aspect théâtrale apporté par Murnau, la réalisation se démarque par la gestion des espaces utilisée pour souligner l'éloignement. L'idée de créer la distance se retrouve lorsque la baronne et le baron se retrouve chacun d'un côté du cadre lorsqu'il lui révèle son crime, ou la place du comte toujours éloignées des autres personnages pour appuyer leurs aversions et leurs peurs. Si les intentions n'avaient point été clair concernant son statut, la couleur marquera cela. La couleur pose un voile émotionnel puissant sur les celluloïds. La séquence introductive présente un salon aux teintes orangées très chaleureux. Les plans qui présenteront l'arrivée du comte seront marqués par un jaune vif et agressif venant perturbé l'ambiance convivial. Cependant, l'usage des couleurs sera à la longue trop excessif, rendant parfois peu pertinentes leurs utilisations. Enfin, le visage de Lothar Menhert n'aidera pas à lui donner une once de sympathie, son faciès de méchante utilisé à bon escient via des gros plans inquiétant et des répliques saillantes.


La Découverte d'un secret est le produit d'un Murnau encore trop attaché au théâtre. Néanmoins, nous y voyons certains poncifs qui reviendrons dans son cinéma, notamment lors de la séquence du cauchemar de l'homme peureux qui ne peut que faire penser à Nosferatu.

Flave
5
Écrit par

Créée

le 18 févr. 2022

Critique lue 36 fois

Flave

Écrit par

Critique lue 36 fois

D'autres avis sur La Découverte d'un secret

La Découverte d'un secret
JKDZ29
6

L'éclosion de la vérité

Après une Promenade dans la nuit tourmentée par des rafales émotionnelles, Murnau nous convie à La Découverte d’un secret, une nouvelle histoire pleine de lourds secrets et de mystères. Nous sommes,...

le 6 mars 2020

4 j'aime

La Découverte d'un secret
ChristopheL1
8

Critique de La Découverte d'un secret par ChristopheL1

Murnau et son scénariste, Carl Mayer (Le cabinet du docteur Caligari, Le bossu et la danseuse, Genuine, Le dernier des hommes, Tartuffe, L'aurore, Les quatre diables), adaptent ici le roman de Rudolf...

le 3 févr. 2012

3 j'aime

La Découverte d'un secret
Jean-FrancoisS
5

L'école du théâtre

Etonnant de découvrir ce film que Murnau réalisa 10 ans avant sa mort. Et de réaliser à quel point sa mise en scène aura évolué en une décennie, durant laquelle il va véritablement révolutionner le...

le 25 févr. 2024

Du même critique

Uncharted
Flave
6

Le début d'une aventure cinématographique

Les Playstation Studios font leurs grands débuts dans le cinéma en prise de vue réelle avec une des licences phares de Sony : Uncharted. Ces débuts sont aussi ceux de Nathan Drake qui n'est pas...

le 13 févr. 2022

11 j'aime

Spider-Man: No Way Home
Flave
7

Ce que c'est d'être Spider-Man

Le film le plus attendu du MCU depuis Endgame est enfin arrivé. Il est difficile pour un fan de Spider-Man, voire de Marvel en général, de ne pas s'émoustiller face à tant de fan service. A l'image...

le 15 déc. 2021

7 j'aime

Scream
Flave
3

Le tueur sur l'affiche est le film lui-même

Scream est un film méta. Conscient du genre où il baigne, il ose en pointer ses tares et joue avec brio de ses archétypes. Nous parlons ici évidemment de celui de 1997, car le « requel » de...

le 15 janv. 2022

3 j'aime

3