Au cours d’une croisière caritative, une journaliste croit discerner la chute d’un corps dans les flots nocturnes ; elle alerte l’équipage, mais nul disparu n’est recensé, nul cadavre ne remonte des eaux impassibles.


Vertige en haute mer et frissons feutrés

La Disparue de la cabine 10 se présente comme une œuvre de suspense maritime où l’élégance d’un yacht de luxe sert d’écrin à une angoisse subtilement distillée. Le film, oscillant entre mystère psychologique et enquête claustrale, tient en haleine et se laisse regarder avec un plaisir docile, idéal compagnon d’une soirée que l’on souhaite troublée sans être bouleversée. L’atmosphère confinée du huis clos sur les flots, délicieusement oppressante, évoque ces rêves d’opulence tournant à la dérive, où chaque murmure semble porteur d’un secret abyssal.


Un huis clos somptueux et hypnotique

Le réalisateur déploie avec un soin maniaque une esthétique luxuriante et glacée : les salons du yacht, saturés de reflets et de verres taillés, composent une scène de théâtre flottante où se mêlent le raffinement et l’inquiétude. La caméra, glissant le long des coursives comme un serpent poli, épouse le trouble intérieur de la journaliste, héroïne vacillante dont le regard devient notre seul ancrage dans ce labyrinthe nautique. Cette claustration flottante, paradoxalement fastueuse, confère au récit une tension soutenue et un charme d’autant plus pernicieux qu’il s’enrobe de soie et de champagne.


L’échange invraisemblable et la crédulité générale

Mais cette élégance visuelle peine à masquer les incohérences incommensurables d’un scénario qui, hélas, s’abîme dans des rebondissements capillotractés à l’extrême. L’épisode de l’échange — pivot supposé du mystère — relève davantage de la prestidigitation narrative que de la vraisemblance. L’esprit du spectateur, plus lucide que le film ne le souhaiterait, demeure suspendu entre scepticisme et dérision.

Quant à la passivité des personnages secondaires, elle confine parfois au grotesque : comment ne pas s’étonner qu’une femme puisse se trouver piégée sous la couverture de la piscine sans que nul convive, nul matelot, nul œil mondain ne s’en alarme ? Ce défaut de cohérence, insidieusement récurrent, fissure le bel édifice du huis clos et dilue peu à peu la tension initiale.


Un mirage de suspense, plaisant mais inconsistant

Bref, c’est un film honnête et ensorcelant à sa manière, un divertissement de belle facture dont le charme tient à sa mise en scène élégante et à son climat d’enfermement mondain. Il séduit sans convaincre pleinement, fascine sans troubler durablement.

Œuvre haletante mais inconsistante, elle vogue entre l’ombre et le vernis, entre la peur et la politesse — un thriller de salon, pour ainsi dire : agréable, raffiné, et aussi insaisissable que la silhouette évanouie de sa mystérieuse passagère.


Trilaw
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