Suite au brillant Quand passent les cigognes, Mikhail Kalatozov se lance dans La lettre inachevée où il s'intéresse à une expédition de quatre géologues russes sur une terre désertique d'Asie à la recherche de richesses pouvant se trouver dans son sol.
Assez vite Mikhail Kalatozov met en place une atmosphère âpre et même quasi-mystique dès que la nature prend de plus en plus en place. Il s'intéresse d'abord à ce groupe d'explorateurs, les relations qu'ils auront et leur découverte avant que la nature prenne une place considérable dans l'histoire. Peu à peu le groupe doit faire face à ces éléments naturels et le film prend une tournure assez spectaculaire que Kalatozov maîtrise à merveille. Brillant derrière la caméra, il capte de manière puissante la force de cette nature qui va mettre à mal l'expédition, sachant même donner une dimension lyrique à son oeuvre. Il s'appuie aussi sur des interprètes d'une grande justesse et notamment l'inoubliable Tatiana Samoilova
Néanmoins j'ai eu l'impression que Mikhail Kalatozov se cachait derrière plusieurs effets, certes brillants, pour masquer les défaillances scénaristiques de son oeuvre. Les personnages ne sont guère étoffés, consistants et finalement, ils sont peu intéressants. De plus il délaisse plusieurs possibilités scénaristiques intéressantes pour ce concentrer sur cette lutte face à la nature et se fait parfois maladroit. Finalement l'ambiance n'est pas aussi angoissante que prévue mais on peut toujours admirer tout le génie de Mikhail Kalatozov et la puissance qu'il arrive à donner à certaines séquences... Et il faut vraiment reconnaître sa maîtrise pour capter les différents éléments naturels dangereux (feu, vent...) tout comme les longues étendues désertes.
[Petite zone de spoilers]
Là où Mikhail Kalatozov commençait à aborder plusieurs thèmes intéressants, tout comme une relation entre deux des géologues il s'arrête pour se concentrer sur le déchaînement naturel et laisse plusieurs pistes inexploitées. Malgré le récent dégel dans le septième art soviétique, j'ai ressenti un côté "propagande" avec la façon dont, de manière héroïque, les explorateurs sont (clairement) prêts à se sacrifier pour ramener les découvertes à l'état puissant où l'individualité ne doit pas exister.
[Fin de la zone de spoilers]
Si l'ensemble est assez décevant vu mon attente et son sujet, notamment à cause d'une écriture défaillante, je ne peux qu'être admiratif devant la maîtrise technique de Mikhail Kalatozov et sa façon de réveiller les éléments naturels qui deviendront des obstacles à l'homme...