(Spoilers) Ah qu'il est compliqué ce film, mais de fait, prenant. Le postulat est génial et part d'un concept tout simple pour dérouler un long métrage très intéressant (j'ai un peu ressenti ça avec "Sans un bruit" de Krasinski). Marc (Lindon, très convaincant dès le début), qui a toujours porté la moustache, décide de la raser. Il veut faire une surprise, se cache un peu et en joue, mais sa femme ne remarque rien. Ses amis non plus, ses collègues pas mieux. Ce simple geste, filmé avec précision et attention, va plonger Marc en crise existentielle et le spectateur par la même. Car on a le point de vue de Marc qui nous raconte la scène. Et on se met à douter avec lui, devenu paranoïaque : est-ce une blague de sa femme étant allée très loin ? Est-il fou ? Ou sa femme l'est-elle et non lui ??? On est avec Marc, et on sent qu'on ne peut pas totalement lui faire conscience comme protagoniste, un peu comme dans Manon Lescaut de l'abbé Prévost. De fait, avec un tel mystère, une telle incertitude, le film est extrêmement prenant, la musique étant habilement utilisée pour instaurer le doute et la tension, puis frustrant (dans le bon terme) car de réponses, il sera difficile d'en avoir, et rien ne sera donné sur un plateau. Alors le rythme casse un peu avec le départ à Hong Kong, surtout l'incompréhension de ce qu'il se passe durant 10 minutes est dure pour le spectateur. Mais le tout se tient parfaitement.


Niveau interprétation, évidemment, on parle du besoin d'être considéré par l'Autre. Soi passe par le regard des autres, et sentir qu'ils ne s'intéressent pas à nous génère une souffrance terrible, que ce soit une inattention réelle ou supposée par schizophrénie, ce que peut laisser entendre le film.
La fin du film, différente du livre original de Carrère, fait supposer une nouvelle grille de lecture, celle de la vie de couple. Quand Agnès finit par reconnaître qu'il s'est rasé la moustache à la toute fin, elle redevient celle du tout début, celle que Marc a toujours connu : tout ce qui se passe dans le film pourrait n'être qu'une parenthèse, une métaphore de la crise de couple, ayant eu besoin de se retrouver au calme (vacances en Asie) pour se retrouver au milieu d'un quotidien fait de repas avec des gens peu appréciés, avec la belle famille et avec des collègues pour lesquelles vous n'êtes peut-être pas si importants. C'est la lecture optimiste de ce film et celle que je préfère garder de ce film, que j'aurais au final vraiment apprécié! Dites-moi votre lecture à vous !

LeTestard
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le 3 juin 2020

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Le Testard

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