A l'image de "L'homme au complet gris", le film questionne la place de la carrière professionnelle dans la cellule familiale. Ces deux valeurs sont au centre de l'Amérique des années 50 en plein boom économique.
Si le personnage de Gregory Peck est indécis sur ces priorités, entre famille et travail, ce n'est pas vraiment le cas en ce qui concerne Tom Winters (Cary Grant). Avant le début du film, il a très clairement choisi l'ambition professionnelle. Il faut un drame (la perte de sa femme dont il était séparé depuis longtemps) pour rendosser le costume parental. Mais la confiance est rompu entre les trois enfants et le père, qui ne sait plus du tout comment communiquer avec eux.
C'est alors qu'apparaît une sorte de Mary Poppins napolitaine. Elle-même a des problèmes avec son pôpa. Et pour prouver qu'elle peut très bien se débrouiller seule et vivre le rêve américain, elle va finir par se faire engager, sous l'insistance des gosses, comme bonne pour la famille. Elle ne sait ni cuisiner, ni faire la lessive ou autres tâches ménagère, mais elle apporte sa fraîcheur et son regard européen sur cette situation.


On va pas se mentir, tout est prévisible dans cette comédie romantique. On prend les bonnes vieilles recettes du genre et on l'adapte à la situation. Au départ, la relation entre Grant et Loren est conflictuelle, puis peu à peu le sentiment amoureux émerge. On a aussi le droit à un triangle amoureux où Grant est tiraillé entre une blonde (Martha Hyer) et une brune, ou la bonne ménagère américaine et l'européenne volcanique, ou la raison et la passion. Et toute cette histoire d'amour se construit entre deux ou trois scènes où le père tente de reconstruire ses liens avec ces gosses. Les enfants sont un peu problématiques, entre un premier qui fugue et un second cleptomane, tout est un peu factice, et j'en vient à me dire qu'il avait peut être raison de se casser.


Le film donne l'impression d'être un patchwork de plusieurs histoires mal gérer entre elles. La première partie du film est pleine de longueur et la seconde s'éparpille un peu trop.
Je pense qu'il faut trouver les raisons dans la production du film. A l'origine, le scénario est une idée de Betsy Drake, femme à la ville de Cary Grant, qui souhaite tourner un film avec son mari. Mais lors du tournage de "Orgueil et Passion" de Stanley Kramer, un an auparavant, Grant a une relation extraconjugale avec Sofia Loren. Il souhaite poursuivre cette romance sur son prochain film. Par je ne sais quel subterfuge, il fait réécrire le scénario pour que le rôle convienne à l'italienne. Exit sa femme qui n'apparaît aucunement dans les crédits. Malheureusement pour Cary Grant, elle va lui préférer le producteur Carlo Ponti durant le tournage (AWKWARD!!!). En faite, cette histoire ferait un meilleur scénario. Toujours est-il que ça explique pas mal le côté bancal et collage du long-métrage.


Malgré les problèmes scénaristiques d'un film qui n'arrive pas vraiment à se décider sur les thématiques qu'il veut aborder, il n'est pas dénué de qualité. D'abord parce que Melville Shavelson, second couteau comme Hollywood savait en faire à l'époque, maîtrise plutôt bien son film d'un point de vue de la réalisation. En prime, on a le droit à une scène de danse des plus romantiques. Et puis faut dire qu'il est difficile de ne pas se noyer dans le regard de Sofia Loren.
Dans sa seconde partie, lorsque l'action se déroule sur la péniche (symbole de la réconciliation entre les enfants et le père), il se dégage du film un certain charme suranné qui n'est pas déplaisant. C'est en grande partie grâce au duo Grant-Loren, à quelques moments comiques (Je pense à la scène du lavomatique où Grant n'est jamais aussi drôle que lorsqu'il inverse les genres), et à des réflexions sur le mépris de la haute société pour ce tout qui est "étranger" à sa culture (thème récurent de la screwball comedy) et ici elle prend l'image d'une italienne.

Belane
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le 13 janv. 2020

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Belane

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