[N’ayant pas lu le roman autobiographique de Fatima Daas dont ce film est adapté, j’ignore totalement si le livre possède les mêmes qualités et défauts. En conséquence, je ne vais pas l’évoquer dans ma critique.]
Dans La Petite Dernière, Hafsia Herzi nous fait suivre quelques mois de la vie de Fatima, la fille cadette d’une famille d’immigrés algériens, qui, à l’entrée de l’âge adulte, se trouve déchirée entre sa foi musulmane et son homosexualité — deux choses pas top top compatibles…
Globalement, j’ai apprécié ce long-métrage. Je ne me suis pas ennuyé une seule seconde. Au contraire, j’ai trouvé le tout assez prenant. Ouais, je dis ça, car je vais embrayer directement sur les reproches, et cela pourrait donner l’impression que je n’ai pas aimé. Ce qui n’est pas — je le répète — le cas.
Alors, passe encore que, à trois exceptions près, les personnages secondaires soient peu exploités et, en toute franchise, peu mémorables (les sœurs, le père, les amis du lycée, de la fac, les partenaires sexuelles et/ou sentimentales !). Je peux comprendre qu’Herzi ait eu pour souhait de se focaliser sur sa protagoniste, en faisant que les autres n’apparaissent, en général, que lorsqu’ils interfèrent directement ou indirectement avec sa quête d’identité. Par contre, j’ai trouvé que son évolution psychologique se faisait trop par à-coups, sans véritable progression dramatique, à travers une utilisation trop abusive de longues ellipses dans le récit. Pour moi, c’est la faiblesse du film. L’héroïne finit par être attachante ; on s’identifie facilement à elle. L’atmosphère… ou plutôt les atmosphères dans lesquelles elle évolue sont bien rendues — notamment par le biais de gros plans fréquents et d’une caméra portée. Donc, cela ne m’aurait nullement dérangé que le tout dure une demi-heure, voire une heure de plus.
Bon, je vais passer maintenant complètement aux qualités. Déjà, pour son tout premier rôle, Nadia Melliti impose une présence forte, incontestable — la caméra l’aime. Ce qui participe au fait qu’on est pris par l’histoire. Ensuite, malgré l’inévitable non-dit persistant, l'environnement familial dans lequel vit le personnage principal est montré comme sincèrement aimant ainsi que joyeux, et non pas comme un lieu d’éventuelle oppression dans lequel il étoufferait. C’est peut-être contradictoire, dans un sens, mais c’est la complexité de la vie et de l’être humain, capable — du moins, la plupart du temps ici — de se compartimenter dans deux existences parallèles.
Et pour finir, je vais mentionner les trois exceptions susmentionnées quant aux personnages secondaires. D’abord, même si on ne le voit que dans deux scènes durant la première moitié du film, le personnage du pneumologue, aussi bienveillant que fantasque, amène une touche de légèreté et d’humour bienvenue. Il est incarné par… un véritable pneumologue, le docteur Pascal Chanez. Autrement, lors de la discussion avec l’imam, je n’ai pas pu m’empêcher de penser que l’acteur jouait d’une manière très réaliste son rôle. Normal, vu que c’est Abdelali Mamoun, imam à la Grande Mosquée de Paris, qui l’interprète. Sinon — et surtout — il y a le personnage de la mère. L’échange entre elle et sa fille, constituant l’une des toutes dernières séquences du film, tout en sobriété et sachant prendre son temps, par l’amour maternel profond qui s’en dégage, offre quelques minutes franchement très émouvantes.