« You damned dirty ape ! » GEORGE TAYLOR

En 1963, le publicitaire américain Arthur P. Jacobs décide de se lancer dans la production cinématographique. Alors qu’il se trouve à Paris pour rechercher des scénarios à produire, l'agent littéraire Alain Bernheim, lui propose plusieurs romans à adapter. L'un d'eux intrigue Jacobs : il s'agit de La Planète des Singes de Pierre Boulle. Il en achète donc immédiatement les droits d'adaptation pour le cinéma.

À l’écriture, l’adaptation du roman est assuré par Rod Serling le créateur de la superbe série anthologique The Twilight Zone. Il entame alors l'écriture de plus d'une dizaine d'ébauches. Il reste fidèle au matériel d’origine, mais il va ajouter la peur du nucléaire. En pleine guerre froide c’est tout à fait logique et contemporain. Il mélange aussi le roman de Pierre Boulle et le scénario d'un épisode de The Twilight Zone : I Shot an Arrow Into the Air. Ce dernier raconte l'histoire d'une équipe d'astronautes qui s'écrasent au milieu d'une planète inconnue et qui finissent par se retourner les uns contre les autres. Après avoir tué ses deux derniers compagnons, l'ultime survivant découvre qu'ils étaient sur Terre depuis le début, tiens donc.

En 1965, Arthur P. Jacobs se met en quête d'un acteur de premier plan pour faire parler du projet. Il contacte ainsi Marlon Brando, Burt Lancaster, Paul Newman, Rock Hudson, Jack Lemmon et Charlton Heston. Seul ce dernier est intéressé. Il trouve le concept fascinant. Il propose même à Jacobs un réalisateur : Franklin J. Schaffner. Celui-ci a énormément travaillé pour la télévision et a même réalisé des documentaires sur la Maison-Blanche en collaboration avec Jackie Kennedy. Il a également déjà dirigé Charlton Heston. Schaffner accepte de participer au projet même s'il est convaincu qu'il ne se fera jamais.

Parallèlement, à cause du manque de budget, la production ne peut suivre à la lettre tout le scénario écrit par Rod Serling. Ils vont donc faire un appel à un autre scénariste pour les coupes budgétaires. C’est Michael Wilson qui vient réécrire (il a déjà écrit l’adaptation Le Pont de la rivière Kwaï de Pierre Boulle). Il donnera un mode de vie bien plus primitif aux primates. Les décors, maintenant désertique, seront donc beaucoup moins chères et colleront mieux à la catastrophe nucléaire. Sa version met ainsi en scène plus d'action tout en réduisant les coûts de production.

Planet of the Apes sort en 1968, même si l’auteur Pierre Boulle ne pensait initialement pas que son roman deviendrait un film, il lui semblait difficile de ne pas en faire un film ridicule.

Charlton Heston, énorme star de l’époque connu pour ses péplums, porte le récit à lui tout seul. Même si il subit plutôt les actions qu’autre chose. Il est celui qui ne croit plus en l’espèce humaine et trouve une espèce encore pire (celle des singes qui est le miroir de notre société). Il va devenir, durant les deux premiers actes, le captif des singes et va subir ce que nous faisons subir à nos animaux. Heston va subir son dernier coup de massue avec la vision de la statue de la Liberté. Il va se rendre compte que les singes avaient raison de ne plus vouloir d’hommes intelligents, ils sont si destructeur.

Le Dr Zaïus qui campe l’antagoniste avait raison, il savait pour les hommes. Lui qui est décrit comme stupide dans le roman et presque visionnaire dans le film.

Œuvre plutôt pessimiste ou le personnage de Charlton Heston et notre société en prennent pour leur grade. Sans compter le message sur les violences animales et sur le racisme.

Maintenant parlons des singes.

Ils sont très clairement le miroir des hommes. Ils sont une représentation de notre société, voir même en pire. Physiquement ils ont perdu tout leur côté animal pour être parfaitement anthropomorphe. Le paquet a été mis sur le maquillage et les costumes. John Chambers (qui recevra un Oscar d’honneur pour le maquillage des singes) va créer des singes tout à fait cohérent avec l’univers. Je pense d’ailleurs qu’il n’y a pas eu besoin de performance d’acteur sous ces déguisements. Désolé pour Roddy McDowall et Kim Hunter qui interprètent Cornélius et Zira.

La musique aussi est très pessimiste, brutal même, tribal. Le son des tam-tams, des tambours et les cris de singes nous laisse jamais à l’abri. Jerry Goldsmith veut nous secouer et quand il arrête sa musique c’est pour entendre les cries et les plaintes de Heston sur le plan final.

Le film se permet même le luxe de corriger la plus grosse incohérence du livre : le professeur Antelle. Le professeur avait perdu son intelligence en l’espace de 4 mois sur Sotor, la planète du roman. Ici, celui qui remplace le professeur : Landon, perd son intelligence à cause d’une ablation du cerveau. Par contre de nouvelles incohérences pointent le bout de leur nez (la langue, les vêtements, etc...).

Pour résumé, l’adaptation de La Planète des Singes est brillante. C’est un tout autre récit que celui du livre. Un pur plaisir. Une histoire, une autre morale et surtout l’une des scènes les plus culte et emblématique dans l’histoire du cinéma.

StevenBen
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Créée

le 20 janv. 2023

Modifiée

le 11 mai 2024

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Steven Benard

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