D’un côté du mur, un petit pavillon et son jardin à la Tati, de l’autre, Auschwitz, dont on ne verra rien mais dont on sait tout. Rudolph Höss, qui dirige le camp, occupe cette maison avec sa famille et ses domestiques. Il est aussi un bon père et un mari aimant. Son épouse, elle, consacre tout son temps à entretenir son foyer chéri, fleurir son jardin et éduquer ses enfants, indifférente aux souffrances de l’autre côté du mur. Auschwitz est un décor lointain, des sons étouffés, des aboiements, des fumées de locomotives à vapeur derrière les arbres, des lueurs rougeâtres de flammes crachées par les hautes cheminées…
L’entrée en matière est réussie et glaçante, avec un hors-champs savamment habité par l'horreur. Mais après ? Passé les premières minutes de découverte, on réalise qu'il n'y aura pas vraiment de récit, ou à peine, juste une chronique familiale distanciée dans une mise en scène désespérément expérimentale (cameras fixes en plans moyens - larges façon télé-réalité). « La zone d’intérêt » apparaît alors pour ce qu’il est, un simple exercice de style, une sorte de happening longuet et au final bien lourdingue... Le film pourrait d’ailleurs s’arrêter au bout de vingt minutes, ça ne changerait pas grand-chose, le propos serait déjà passé.
Une fois ingéré le décalage épouvantable de cette petite maison idéale séparée de l’innommable par un simple mur, que reste t'il ? La banalité du mal ? Faut-il pour cela nous l'exposer dans une succession interminable de sequences qui se ressemblent toutes et avec un parti-pris de mise en scene dans lequel le réalisateur se complaît tant ? C'est vain et c'est déplacé comme si le seul et unique but de Glazer était de susciter le dégoût, encore et encore, face au détachement forcené de ses personnages. Mais pour dire quoi ? Que certains sont capable de s’accommoder ou de nier la réalité la plus horrible qui soit pour préserver leurs intérêts et leur petit confort ? Oui on le sait, la nature humaine peut amener a ses extrémités. Et après ? La démonstration, si demonstration il y a, s'avère totalement creuse et stérile, notamment d'un point de vue strictement cinématographique. Mais il ne fait aucun doute que cela plaira à ceux qui aiment les bêtes à concours.