Ram Gopal Varma est un pilier du cinéma indien depuis environ 30 ans. Il s’est essayé à de nombreux genres, des sagas politiques aux films d’horreur en passant par les histoires d’amour et les thrillers psychologiques. De son propre aveu, il s’ennuie facilement et aime réinventer et imaginer des histoires différentes. Avec Ladki : Enter The Girl Dragon, il va laisser exprimer son obsession de toujours pour Bruce Lee, qu’il admire, qu’il adule, et plus particulièrement un film qu’il juge parfait : Enter the Dragon (Opération Dragon chez nous). Le problème, c’est que depuis pas mal d’années maintenant, Ram Gopal Varma enchaine les films à la qualité souvent discutable. Le réalisateur / producteur / scénariste semble avoir perdu de sa superbe et, autant le dire tout de suite, ce n’est pas ce Ladki qui va redorer son blason. Cette coproduction sino indienne, qui se proclame « premier film d’arts martiaux indien », est un ratage grossier sur toute la ligne. A noter que c’est de la version chinoise, expurgée de 29 minutes (on passe de 2h13 à 1h44) dont on va parler ici et après avoir vu cette « version courte », ça ne donne clairement pas envie de voir la version longue.


Ladki : Enter the Girl Dragon, c’est surtout une ode à son actrice principale, la débutante Pooja Bhalekar. Championne de taekwondo (elle a de multiples titres à son actif), elle a appris le Jeet Kune Do de Bruce Lee pendant trois ans pour le film. Alors que la diablesse se démène pour montrer ses aptitudes physiques, assez impressionnantes il faut l’avouer, participant même à l’élaboration des chorégraphies du film, Ram Gopal Varma semble bien plus intéressé par le fait de montrer la plastique de la demoiselle sous tous les angles plutôt que ses prouesses martiales. Des plans culotte, des plans décolleté, de face, de dos, sur ses cuisses, sur son nombril, … Son anatomie n’aura plus aucun secret pour le spectateur. Le pire étant le final, dans lequel elle arrive habillée, mais rapidement le « scénario » va pallier à ce problème avec un grand méchant très méchant qui va lui découper les habits au ciseau. Ladki : Enter The Girl Dragon est un film à la gloire de son actrice. Elle est de quasi tous les plans, et les quelques minutes laissées aux autres personnages ne sont là que pour donner au film un semblant d’histoire. Si au moins les combats valaient le détour, mais à part deux ou trois petits moments qui nous font penser qu’il y a du potentiel, les combats font pschitt et coulent avec le reste de la bobine. La demoiselle a clairement des compétences martiales et ça se voit. Elle lève la gambette avec une grande aisance et tatane du mâle décérébré tout le long du film. Le problème, c’est que toutes les bastons se ressemblent. Le personnage de Pooja Bhalekar semble invincible, elle doit prendre trois coups maximum dans tout le film et rapidement, il n’y a plus réellement d’enjeu. D’autant plus que les méchants ont souvent tendance, lors des bastons à plusieurs, à attendre leur tour et quand enfin ils se font frapper, on sent qu’ils se préparent à encaisser les coups de la tigresse. Le résultat à l’écran oscille entre le sympathique et le raté et même lorsque c’est regardable, le réalisateur abuse plus que de raison de ralentis qui n’ont parfois aucun sens, placés n’importe quand. A vitesse normale, les combats auraient eu bien plus de gueule.


Les personnages, on ne peut plus caricaturaux (bordel ce sbire ridicule, bras droit du grand méchant, insupportable à chacune de ses apparitions), sont interprétés par des acteurs qui jouent pour la plupart comme des patates, ce qui n’aide pas à s’intéresser au scénario pas bien épais. La relation amoureuse, des plus classiques, prend rapidement trop de place (pas mal de scènes de romance semblent avoir été coupées dans cette version courte) avec en plus des chansons niaises, ici sur fond de drague de séduction au bord de mer ou sur une barque, avec un kitch guimauve de tous les instants. Il n’y a pas de danse (du moins dans cette version courte) et c’est déjà ça. Le kitch est poussé à son paroxysme dans les combats lorsqu’une bonne partie des coups de l’héroïne se retrouvent affublés d’un bruit de tigre qui rugit, d’ours quand elle s’énerve, de bruit de train à vapeur ou de cheval quand elle commence à courir, ou d’un cri d’aigle quand elle fait un coup de pied sauté. Au moins on se marre. Pour l’hommage à Bruce Lee qui revient sans cesse, Ram Gopal Varma enfile ses plus gros sabots. On le trouve partout, dans les poses du personnage principal, ses mouvements lors des combats, dans les bruitages, dans la musique, dans des citations, dans les dialogues et sur les décors, ou parce qu’il est tout simplement cité lui ou ses films. Et ça commence dès le générique d’intro dans lequel « Bruce Lee » est répété en boucle une bonne vingtaine de fois histoire qu’on comprenne tous de quoi il en retourne. Ram Gopal Varma signe ici un film putassier, pas aidé par une mise en scène pas du tout inspirée malgré une photographie plutôt jolie offrant des plans réellement intéressants visuellement parlant. Ladki : Enter The Girl Dragon aura au moins le mérite de propulser sur le devant de la scène l’athlétique Pooja Bhalekar, à voir si ce qui ressemble plus à une bande promo sexy qu’à un vrai film martial lui permettra de faire décoller sa carrière…


Avec Ladki : Enter The Girl Dragon, le réalisateur Ram Gopal Varma se rate à tous les niveaux et signe un film flirtant régulièrement avec le nanar. Si vous voulez vous rincer les yeux avec une actrice mise sur un piédestal, ce film est pour vous. Si vous cherchez un bon film, passez votre chemin.


Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-ladki-enter-the-girl-dragon-de-ram-gopal-varma-2022/

cherycok
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le 23 janv. 2023

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