Je le dis souvent, je n'aime pas les critiques courtes. Mais ces derniers temps, je me suis retrouvé dans cette position particulière où je n'ai pas envie d'écrire une critique complète, exhaustive, approfondie d'une oeuvre quelconque, mais pourtant, il y a ce petit truc qui me brûle les lèvres.
Donc une nouvelle fois, je tape dans le court pour parler de ce premier court du maître de l'animation en stop motion (non, pas Ray Harryhausen) (non pas Willis O'Brien non plus, vous commencez à être lourds!), Jan Svankmejer (comment ça "on avait deviné..." ?).
Un rapport à la matière organique qui évoque Cronenberg, une finesse dans l'utilisation du Stop Motion à ce jour inégalée, même par le grand Harryhausen, un sens de l'humour pas toujours fin et une finesse d'esprit pas toujours drôle, le cinéma de Svankmejer est à nul autre pareil. La folie tient de l'obsession chez le réalisateur, et son amour pour le surréalisme, habite son cinéma dans son entier.
Habitué au coté sombre de son cinéma, son utilisation de véritable chairs qu'il anime par la magie du stop motion, j'ai été un peu surpris et on pourrait dire déçu par ce premier court-métrage, beaucoup moins audacieux que ce à quoi le réalisateur m'avait habitué.

Mais après coup, quelque chose m'a frappé.

Souvenez vous, c'était dans les années 90, le groupe Les Têtes Raides étaient dans leur meilleure période avec Fleurs de Z'yeux, Le Bout du Toit, et Le Chamboul'tou, Louiz'Attack surfait sur la vague avec son premier album et surtout son tube qui ne quittait pas les ondes, toute une scène revendiquant autant le punk que la chanson française de Brassens, Brel (bon, ok, francophone disons), Ferré, et une esthétique sortie tout droit des Beaux Arts et des facs d'Art Plastiques, avec des sculptures en terre cuite mêlées à des collages punk, une imagerie mi drôle mi malsaine, une fascination pour l'univers des nomades du spectacle, du cirque, des dessins qu'on retrouvait 10 ans plus tôt dans les J'Aime Lire, avec ce coté malsain qui me mettait mal à l'aise quand j'étais gosse. Un art hybride entre récupération et création, installations qui sentent la mer, le bois, les clous, le platre et la terre cuite, quelque chose d'original et à la fois sans âge, puisant dans un inconscient collectif que même le jeune con que j'étais ressentait au fond de lui.

Pourquoi je parle de cette période, de cette esthétique ? Regardez le premier court de Svankmejer et vous comprendrez. Tout y est, la fascination du monde du cirque, le surréalisme, les sculptures qui ne dépareilleraient pas dans le livret d'un album des Têtes Raides de l'époque, les collages, les machines folles, le spectacle, l'humour mâtiné d'une dimension un peu malsaine. Tout.

Alors comment juger ce film ? Et de quel droit ?
Doit-on lui reprocher de ne pas se hisser au niveau d'excellence que le réalisateur atteindra après, et le noter en fonction ?

J'ai décidé de reconnaitre en lui les racine d'un univers qui a éclos 30 ans plus tard, et saluer ce protopunkisme french touch largement avant l'heure, ce chaînon manquant entre les surréalistes, Dada, et cette scène qui m'avait tant touché après un concert magique au Caveau des Trinitaires à Metz.

La filiation est là, n'attendant que d'être touchée du doigt.
toma_uberwenig
7
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le 16 août 2012

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toma Uberwenig

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