Le scénariste Francis Veber avait deux personnages fétiches François Pignon et François Perrin. Ces deux personnages alimentent une bonne dizaine de comédies qui ont généralement connu le succès. Dans l'esprit de Francis Veber, les deux personnages sont du même genre c'est-à-dire confrontés à une situation qui les dépasse ou dont il n'ont pas conscience. Ce qui permet un comique de situation plutôt efficace.


"Le Grand Blond" n'échappe pas à la règle. C'est un des premiers personnages de François Perrin, ici violoniste professionnel qui se trouve embringué dans une histoire d'espionnage par hasard parce qu'il portait des chaussures dépareillées "parce que les copains à l'hôtel lui avaient fait une blague".


Je n'avais pas vu le film au cinéma à sa sortie. Je l'ai vu bien plus tard à la télé et ai été subjugué par l'humour permanent qui règne dans le film. Attention, ce n'est pas un humour où on rit à gorge déployée du début jusqu'à la fin, bien que parfois on rit bien. C'est un humour concernant les situations mais aussi les caractères qui sont (juste un peu) stéréotypés. Veber fait plutôt dans la finesse.
Les noms improbables des chefs des services secrets Toulouse ou Milan, les prénoms Louis-Marie-Alphonse pour le premier, Bernard pour le second qui remettent à leur (vraie) place les deux personnages. Les agents de l'un ou de l'autre ont les mines hyper sérieuses, ne rigolent jamais et en font juste un tout petit peu plus (mais pas trop pour éviter le burlesque) pour provoquer le sourire et l'entendement du spectateur.
Par exemple, l'agent (Jean Michel Mole ?) qui démonte les poupées russes est juste excellent et amusant dans son travail minutieux et bien fait. Il respire le travail bien fait et soupire à l'idée de réenquiller ses poupées.
On pourrait prendre chaque personnage et on trouverait de la même façon le ressort comique le concernant. Sérieux mais avec juste un petit plus. Pour moi, ce film est un exemple de scénario bien gaulé, approfondi où aucun détail n'est négligé et les personnages sont parfaitement définis.


Je repense à une scène amusante où les agents de Milan et Milan lui-même écoutent et regardent Mireille Darc s'envoyer en l'air avec Pierre Richard. Alors que ce n'est pas le moment, l'agente sert du café et se fait renvoyer dans ses vingt-deux, comme si de la situation espionnée (croustillante) allait brusquement surgir un critique secret d'état.


On peut aussi dire que le réalisateur Yves Robert a disposé d'un casting superbe pour accompagner et manipuler avec le plus grand sérieux, le personnage farfelu de Pierre Richard. Jean Rochefort en guerre contre les coups bas de Bernard Blier, Paul Le Person en adjoint fidèle et un tantinet philosophe de Rochefort : "J'ai préféré un grand blond avec une chaussure noire à un grand noir avec un loden vert."


Des deux personnages qui sont amis, joués par Pierre Richard et Jean Carmet, on voit que les deux ne comprennent rien à la vraie situation : le premier ne fait que s'étonner subrepticement des situations bizarres et surfe sur un optimisme débordant tandis que le deuxième qui voit sa femme le tromper et voit des tas de cadavres s'enfonce dans un pessimisme dépressif.


Mais l'omniprésente musique à la flute (de Pan) rend toutes ces situations - horribles quand on y réfléchit - tout-à-fait acceptables. On est bien dans une parodie du film d'espionnage.


D'ailleurs, l'article 9, alinéa 1 du code civil spécifie bien :
Chacun a droit au respect de sa vie privée
Donc, c'est bien sûr que le film n'est qu'une situation imaginaire qui réglementairement ne saurait exister.


Film excellent que je revois toujours avec grand plaisir. Certainement un des meilleurs rôles de Pierre Richard. Certainement un des meilleurs François Pignon/Perrin.

JeanG55
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le 22 déc. 2021

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JeanG55

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