Le Seigneur Des Anneaux c’était un peu cette fille dont t’étais amoureux au lycée, magnifiquement roulée, gentille câline et éventuellement peu farouche à l’idée de te faire perdre ta virginité du moment que tu lui rendais la pareille. Tout ça elle te l’a donné et tu te dis que t’en as eu pour ton argent (façon de parler). Quelques années plus tard tu la retrouves ta chérie et bien qu’entre temps t’en as connu d’autres, t’es tout à fait prêt à remettre le couvert avec elle, surement par nostalgie. Au début, tes souvenirs sont aveugles et tu lui donnes une chance en mémoire du passé, faut dire qu’elle est toujours assez bien balancée. Mais ça dure pas, après la magie des retrouvailles tu finis par ouvrir tes yeux et te rendre compte qu’elle a quand même bien grossi, qu’elle se maquille beaucoup trop et surtout qu’elle est quand même devenue un peu conne.

Le Seigneur Des Anneaux était un grand moment de cinéma, une découverte pour ceux qui n’ont jamais réussi à lire Tolkien faute d’un stock suffisant de paracétamol, la réalisation d’un fantasme pour ceux qui, on ne sait pas comment, on réussi à terminer la trilogie papier. Tout ou presque était bon, aussi bien les acteurs que la musique, les effets spéciaux et la mise en scène. On avait même droit à des réflexions « qu’elles font trop réfléchir » sur le rapport de Frodon avec l’anneau. Le Hobbit était l’occasion d’en prendre une dernière dose pour la route, de replonger dans cet univers à mi-chemin du réel et de l’imaginaire, de retrouver des têtes qu’on aime. Un Voyage Inattendu a fait illusion, la joie des retrouvailles aidant. On a retrouvé le goût de ce qu’on avait aimé, les décors, les coutumes, les cultures et les peuples qu’on avait découverts. On reculait juste pour mieux sauter.

Dans la désolation de Smaug, l’impitoyable comparaison avec la première trilogie (que Jackson revendique) devient presque violente tant tout ce qui s’étale sous nos yeux a un goût frelaté. Pourtant tout semble en place, mais plein de petites choses beaucoup trop nombreuses viennent bousiller la fête et transformer l’idée qu’on avait d’aller voir le dernier, comme si on laissait dans sa boîte un hamburger pas terrible, mais qu’il faut pas gâcher. L’histoire est carrément la même que dans le Seigneur Des Anneaux (point de vue de profane qui n’a pas lu), l’anneau qui fout le bordel et te murmure des saloperies à la l’oreille et un roi déchu qui veut qu’on lui rendre son trône…en bronze, même type de personnages, les nains et Gandalf faisant furieusement penser à La Communauté De l’Anneau. Jackson veut tellement faire dans la référence qu’il finit par s’auto-plagier… Legolas qui vient ici comme un cheveu sur la soupe, faut dire que depuis, Orlando Bloom n’a eu depuis Le Seigneur Des Anneaux que Pirates Des Caraïbes à se mettre sous la dent, un petit cachet ça fait jamais de mal. Le problème c’est qu’on voit que l’acteur a vieilli et forci et puis c’est quoi ces yeux tout translucides qui te foutent presque les jetons ?!

On avait adoré la musique de Shore qu’était tellement bonne que tu la fredonnais dans le métro, signe déjà qu’on s’en souvenait. Là t’as eu l’impression de passer 2h45 dans un ascenseur, musique de fond insipide et oubliable avant d’avoir eu le temps de s’en souvenir, des notes de violon qui s’étirent, qui s’étirent, jusqu’à ce que tu rendes tes sushis sur le voisin de devant, comment un tel talent peut sombrer à ce point en si peu de temps ?! Fond du problème : la perte de souffle car tout cycliste qui se respecte doit être capable de retrouver la patate après un effort. Jackson n’y arrive pas lui, la baisse de régime est impressionnante, il a les cartes en main pour redonner de l’enthousiasme mais on dirait que lui n’en a pas. S’il n’y avait pas eu la précédente trilogie ces films seraient surement mieux jugés, mais comment ne pas comparer ?

Comme il faut sauver le soldat Bilbon disons que décidément Martin Freeman est terriblement convaincant dans le rôle, drôle ou touchant et souvent maladroit, la grande classe. Evelangeline Lilly en Tauriel est absolument fondante, on en aurait voulu à Jackson de la faire mourir, il aurait plus manqué qu’il tue Tauriel. Puis faut bien reconnaitre que des Elfes ça te vaut toutes les pubs pour après-shampoings. Vas-y que je te tue vingt orques entre deux brushings et je reste toute bien coiffée, une flèche un coup de brosse, une flèche un coup de peigne et ainsi de suite... Il y a aussi quelques bonnes séquences, entre autres la descente des rapides en tonneau, ça va vite tout en étant fluide, rythmé tout en étant coulé (pour de vrai à la fin), on en aurait tellement voulu plus des comme ça et moins d’araignées géantes (oui encore…) qui n’ont servi qu’à faire peur à madame. Heureusement qu’il y a la fin, heureusement que Smaug est une vraie réussite, heureusement que sa voix originale est une des plus belles jamais entendues, rappelant celle de Bane dans The Dark Knight Rises. Heureusement que Smaug est fabuleusement beau, le dragon comme on l’a toujours rêvé étant petit ou grand gosse. Heureusement que son ventre prend la couleur d’un volcan en éruption quand il va cracher du feu, heureusement que ce royaume sous la terre est grandiose et qu’il nous donne à nous aussi envie de surfer sur des pièces d’or. Heureusement que sur cette fin, Jackson ne s’est pas planté.

Mais ta copine de lycée pue quand même du bec, elle a beau avoir encore de beaux atours et une poitrine qui n’a pas encore dégringolé de quarante étages, elle n’a plus le charme de jadis. Jackson fait de moins en moins rêver, quand il aura terminé cette trilogie il faut qu’il passe complètement à autre chose, il n’y a que comme ça qu’il sera moins attendu au tournant. En attendant il nous a bien eu avec cette fin tranchée dans le vif, il y en a déjà eu des fins qui finissent en queue de poisson mais là, couper Smaug en plein vol sur le point d’aller barbecuiser les hommes, ça a fait bien rigoler dans la salle genre : « Mécréant, tu nous as bien eu sur ce coup-là ! » Heureusement que madame a accepté de ne pas prendre sa douche seule ce soir-là, la frustration aurait été intolérable sinon… Bon pour finir sur une note négative, l’intérêt de la 3D réside dans le logo Warner au début et trois abeilles pendant le film… Ah non, y aussi les trois euros supplémentaires par tête de pipe (sans compter celle sous la douche…) mais ça, c’est une autre histoire...

P.S. : La soirée était pas si mal, madame était aussi sur Paris et le Gaumont Convention est un cinoche pas trop inhumain juste à côté de l’hôtel, et puis y a eu la douche…
Jambalaya
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le 18 déc. 2013

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Jambalaya

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