Cette peinture aux néons des bas-fonds d’une nuit de Chine, s’avère être une expérience remarquable dans sa stylisation. Quant aux enjeux, le déclin et la chute, ils sont un véhicule qu’utilise le réalisateur pour masquer ses influences.


Pas réellement emballé par le précédent film de Diao Yi’nan, le polar enneigé et austère Black Coal, je me laissai tenter par deux aspects primaires, pour visionner ce dernier : son affiche, avec cette petite lueur d’espoir dans un bain de lumière obscure, et son titre, ouvrant un grand champ d’espaces des possibles.


Rapidement, j’ai pensé à un autre cinéaste chinois s’étant illustré récemment par sa distanciation et sa stylisation, en l’occurrence l’auteur d’Un Grand Voyage vers la Nuit, Bi Gan. Les lieux, décrits comme un espace imaginaire, froid et austère servant de lieu l’errance à un quidam qui traverse la nuit comme une quête sans espoir autre qu’une échappatoire. Malgré ses emprunts évidents, Yi’nan préfère la confrontation directe au genre à la digression permanente.


Plutôt doué pour créer de l’imagerie, il réussit quelques plans séquences de toute beauté, techniquement bluffant, à la violence sèche et subite, qu’il filme frontalement et sans concession, comme pour faire mieux exploser les interdits inhérents à la censure étatique. D’emblée on comprend que la quête du héros, ici un chef de gang déchu traqué de toute part qui tente un dernier baroud d’honneur, est totalement sans espoir. Se battre contre un système étant une illusion délétère. Les policiers qui le traquent ne se dépareillent pas des gangs dans leur gestuelle et leurs méthodes. Ils sont vêtus pareils et utilisent les mêmes procédés violents.


Une peinture sombre teintée de fatalisme, extrêmement stylisée, par un auteur vraisemblablement doué techniquement qui gagnerait à donner de l’épaisseur à un script souvent confus et au final assez creux.

Créée

le 25 mai 2020

Critique lue 382 fois

11 j'aime

1 commentaire

Critique lue 382 fois

11
1

D'autres avis sur Le Lac aux oies sauvages

Le Lac aux oies sauvages
EricDebarnot
4

Le lac d'ennui sauvage

J'aime - et je soutiens autant que je peux à mon tout petit niveau - le cinéma chinois (... en tous cas tout ce qui n'est pas le cinéma "officiel" du régime, qui va de plus en plus vers la copie...

le 28 déc. 2019

62 j'aime

18

Le Lac aux oies sauvages
Velvetman
8

Sortez le parapluie

Réussissant tout ce qu’il entreprend avec une facilité déconcertante, Le Lac aux oies sauvages est un sérieux candidat aux honneurs finaux de la sélection de ce Festival de Cannes 2019. Le long...

le 24 déc. 2019

33 j'aime

Le Lac aux oies sauvages
takeshi29
9

En rose c'est noir

Voici donc la petite chose qui m'a obligé à quitter "Yves", et que j'ai abordé non sans fébrilité, tant je l'attendais comme un fou depuis Cannes. La peur d'être déçu certainement, comme j'avais pu...

le 28 juin 2019

32 j'aime

23

Du même critique

L'assassin habite au 21
philippequevillart
8

Meurtre oblige

Première incursion de Clouzot dans un genre auquel il donna ses plus belles lettres de noblesse, en l’occurrence le thriller à la Hitchcock. Pour se faire il adopte un style emprunt à la Screwball...

le 21 avr. 2020

18 j'aime

8

Joker
philippequevillart
6

Autant de clown clinquant

C’est auréolé d’une récompense à la Mostra de Venise et d’une pluie de critiques dithyrambiques annonçant un classique instantané et une performance d’acteur de la part de Joaquin Phoenix emprunte...

le 9 oct. 2019

18 j'aime

5

La Chienne
philippequevillart
8

L'ange et la mort

Dans La Chienne, second film parlant de Jean Renoir, c’est surtout quand les voix se taisent et que l’image reprend naturellement ses droits que le lyrisme dramatique s’impose pour offrir de grands...

le 31 janv. 2023

18 j'aime

2