Le Naufragé
6.8
Le Naufragé

Court-métrage de Guillaume Brac (2009)

Deux films.
Deux petites merveilles, drôles et tendres, sorties de nulle part, si ce n'est que des imaginaires galopant sur les plages en fin d'été.

Un lieu.
Station balnéaire picarde, trois fois mortes en hiver, à peine plus vivant lorsqu'advient l'été. Où le soleil souvent se cache, timide, se montre à peine, où le vent souffle, poussé par le battement des cœurs.

Une rencontre.
La première sur une route, un cycliste qui a crevé sa roue et un type en voiture. La deuxième avec ce dernier et deux filles qu'on croiraient copines, alors que ce ne sont qu'une mère et sa fille.

Une amitié qui naît, qui s'esquisse, qui éclot véritablement au moment où Brac coupe, puisqu'il n'a d'intérêt que pour la construction des choses, là où leur épanouissement sera occupé par notre imagination.

Un marivaudage, un badinage, un quatuor d'éternels amoureux qui se prennent et se lâchent la main, et toujours le vent qui souffle, le village qui dort, les cheveux qui tourbillonnent.

Un thème.
La solitude.

Un Sylvain.
Eternel solitaire.

Un cinéaste.
Filmant avec distance et tendresse un monde sans femmes et sans cynisme, des rencontres probables, des situations possibles. Rien de plus que ce qu'on pourrait voir si l'on voulait s'arrêter de marcher en fixant nos pieds ou nos portables, et se mettre à regarder, juste ça, fixement et simplement, ces gens qu'on aimerait déjà de toute façon, et qui nous ressemblent.

Au pire, Guillaume Brac s'en charge pour nous, subtil peintre des visages ordinaires, nous donnant à voir leur beauté.
Qu'ils sont simples, ces gens, modestes, généreux et faillibles, dont écraser par erreur une fourmi pourrait les faire pleureur de honte !
Qu'il est beau ce film, ce film qui est notre, qui arrive et qui repart, comme le vent, comme les rencontres, comme les silhouettes qu'on semble maintenant connaître par cœur et qu'on aura effleuré à son rythme !

Et s'il ne fallait qu'un geste pour illuminer un jour de gris, l'un des deux films le contient : une prise de main le temps d'un long plan, celle qui faut pour dire l'étrangeté d'un homme qui se lance, sa maladresse et sa bienveillance à la fois. Tout ce qui fait que Sylvain, c'est nous, qu'on ne le connais que depuis 55 minutes et qu'on voudrait déjà le revoir, oh oui, déjà, lui écrire, lui parler, lui dire qu'on l'aime, qu'on les aimes tous, qu'on voudrait tous les voire s'aimer, dans le vent tous les trois, figés dans la trop courte durée de ces vacances en Picardie.
B-Lyndon
6
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le 1 juin 2013

Critique lue 492 fois

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B-Lyndon

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