Suivant une théorie personnelle parfaitement discutable, qui ne repose que sur mon ressenti, j'ai eu dit dans d'autres "chroniques" de films de Veber, réalisateur ou scénariste, que je préférais les François Perrin aux François Pignon. Pour une raison simple, c'est que je suis plus à l'aise pour rire des aventures d'un François Perrin malchanceux que de celles d'un François Pignon, looser.
Je ne rappelle pas mon aversion profonde pour le succès planétaire (au moins !) du "diner de cons" que j'ai vu, où je n'ai pas ri une seconde et dont je suis sorti, écœuré, l'estomac au bord des lèvres. Trois ans plus tard, le film suivant de Veber, "le placard", remet en scène un nouveau François Pignon, heureusement moins pathétique ou ridicule.
Tout en restant dans le mode de la comédie, Francis Veber aborde le monde de l'entreprise et quelques-uns de ses modes de fonctionnement. Un employé de la comptabilité, François Pignon (Daniel Auteuil), effacé et plutôt minable, apprend, par hasard, qu'il fait partie de la prochaine charrette. Il a déjà perdu sa femme et son fils à travers un divorce, s'il perd en plus son job, il ne lui reste plus qu'à en finir une bonne fois pour toutes. Son voisin (Michel Aumont), ancien psychologue en entreprise à la retraite, le sauve de son désespoir et monte avec lui une stratégie pour le faire passer pour homosexuel, faisant ainsi hésiter la direction dans sa décision de le licencier, de peur d'être accusée de discrimination.
En somme, c'est une recette (pour le moins paradoxale) pour transformer un looser en un battant ...
Bon, pourquoi pas. J'y crois moyennement mais ce n'est pas vraiment le problème. En revanche, l'intérêt que j'ai vu dans le film c'est de voir le regard des collègues se modifier de diverses façons, suivant le degré de bêtise ou l'intérêt perso de chacun. En cela, le film est plutôt réussi car la charge "comique" est également répartie sur l'ensemble de la distribution et ne repose pas que sur une victime désignée. Du patron campé par un politique Jean Rochefort à un Gérard Depardieu, chef du personnel plutôt bourrin et gaffeur, en passant par la cheffe directe de Daniel Auteuil, Michèle Laroque dans le genre fine mouche, tout le monde en prend pour son grade, c'est le cas de le dire. Chacun devra, d'une façon ou l'autre, réviser sa position ou sa façon d'être. En cela, les différentes situations (parfois) caricaturales pour leur potentiel comique sont finalement assez crédibles.
De mon point de vue, j'ai trouvé le film de Veber plutôt intelligent et ouvert dans son approche. Même si je n'ai pas vraiment ri (qu'y avait-il de risible à part ce pull rose trop grand de deux tailles ?), j'ai trouvé que le film de Veber était un bel exercice d'équilibriste.