Au diable la famille
Un jeune homme cherche à échapper à l'étouffant milieu familial avec un père alcoolique et un mère qui se tue au travail, en devenant écrivain. Pour réaliser son ambition, il n'hésite pas à...
le 10 sept. 2019
1 j'aime
Voir le film
Il y avait le Bo Widerberg politique de la charnière des années 60/70 ("Ådalen 31" et "Joe Hill"), le Bo Widerberg du thriller dans les années 70 ("Un flic sur le toit" et "L'Homme de Majorque"), il y avait même le Bo Widerberg romantique ("Elvira Madigan"), et il faudra dorénavant compter le Bo Widerberg en prise avec une version suédoise du néoréalisme italien. Le protagoniste de 18 ans interprété par Thommy Berggren, un fidèle du réalisateur, restera le point focal de tout le récit situé au milieu des années 30 dans un quartier ouvrier très pauvre de Malmö. Le père est un alcoolique ayant renoncé à à peu près tout, la mère tente de faire survivre le foyer en faisant des ménages épisodiques, et le fils rêve de devenir écrivain. Un rêve qui se lit comme une aspiration à l'évasion, pour s'enfuir de ce milieu délétère au plus haut degré, pour s'extraire de ce déterminisme social qui le plaque au sol avant même de lui avoir donné la moindre chance d'élévation.
C'est donc sous l'angle de la chronique sociale que "Le Quartier du corbeau" avance, en donnant à voir les effets de la Grande Dépression en Suède, loin de la capitale. Difficile de nourrir le moindre espoir dans cet environnement nocif, où on se tue à la tâche dans des boulots merdiques pour gagner à peine de quoi manger (et on est loin du festin, on s'en doute). En plus de cela, le national-socialisme enfle dangereusement aux frontières du royaume. Ce n'est pas pour autant un film sordide, Widerberg cultivant une veine plutôt tournée vers une ambiance désabusée, étouffante mais pas mortifère. Un microcosme où la misère règne, enfermé dans sa grisaille et ses murs de brique, avec de temps en temps quelques fausses lueurs d'espoir — l'épisode de la publication du roman est éloquente à ce sujet, au cours de laquelle Anders part rencontrer la maison d'édition plein de fougue pour revenir détruit, car il ne s'agissait que d'encouragements.
Et un jour, la goutte d'eau fait déborder le vase. Une humiliation de plus de la part du père, et voilà qu'il trouve l'énergie d'accompagner son ami pour Stockholm. La misère sera sans doute équivalente, le fatalisme reste maître en ces lieux, mais au moins, quelque chose aura changé.
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les films en Noir & Blanc par choix esthétique, Top films 1963, Avis bruts ébruités, Réalisateurs de choix - Bo Widerberg et Cinéphilie obsessionnelle — 2023
Créée
le 21 sept. 2023
Critique lue 10 fois
D'autres avis sur Le Quartier du corbeau
Un jeune homme cherche à échapper à l'étouffant milieu familial avec un père alcoolique et un mère qui se tue au travail, en devenant écrivain. Pour réaliser son ambition, il n'hésite pas à...
le 10 sept. 2019
1 j'aime
Il y avait le Bo Widerberg politique de la charnière des années 60/70 ("Ådalen 31" et "Joe Hill"), le Bo Widerberg du thriller dans les années 70 ("Un flic sur le toit" et "L'Homme de Majorque"), il...
Par
le 21 sept. 2023
Du même critique
Ceci n'est pas vraiment une critique, mais je n'ai pas trouvé le bouton "Écrire la chronique d'une désillusion" sur SC. Une question me hante depuis que les lumières se sont rallumées. Comment...
Par
le 20 juil. 2014
142 j'aime
54
"Birdman", le film sur cet acteur en pleine rédemption à Broadway, des années après la gloire du super-héros qu'il incarnait, n'est pas si mal. Il ose, il expérimente, il questionne, pas toujours...
Par
le 10 janv. 2015
138 j'aime
21
Her est un film américain réalisé par Spike Jonze, sorti aux États-Unis en 2013 et prévu en France pour le 19 mars 2014. Plutôt que de définir cette œuvre comme une "comédie de science-fiction", je...
Par
le 8 mars 2014
125 j'aime
11