Le Roi
6.3
Le Roi

Film de David Michôd (2019)

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Le roi d’Angleterre est Franco-Américain

On pensait que les films parlant de période historique était voué à disparaître. Beaucoup trop coûteux et ne rapportant pas assez. Depuis, Netflix est arrivé et le regain sur des oeuvres historiques est revenus. The Outlaw King : Le Roi Hors-la-loi était une bonne surprise, place maintenant à The King, sorti au début du mois avec en tête d’affiche : Timothée Chalamet



Il ne voulait pas être roi



The King c’est la seconde collaboration entre David Michôd et Netflix, c’est aussi le deuxième film historique de Netflix après Outlaw King : Le Roi Hors-la-loi. Cette fois-ci, on ne sera pas en écosse, mais en Angleterre en suivant l’ascension du roi Henry V (Thimothée Chalamet) en évoquant principalement la grande bataille d’Azincourt en 1415, contre le royaume de France en pleine guerre de 100 ans.


Netflix, à beau dire que c’est un biopic, un film inspiré de faits réels, mais il ne faut pas croire ce que nous montre le film, d’un point de vue historique, le film fait fausse route. Il faut plutôt parler d’une adaptation de la pièce de théâtre : Henry V de William Shakespeare qu’il a écrit en 1599, mais pour ceux qui connaissent la pièce de théâtre, on peut voir qu’il y a quelques libertés.


Comme dans la pièce, le début du film s’attarde énormément sur la vie d’Hal avant son ascension au trône, il y a une volonté de la part de David Michod et son co-scénariste Joel Edgerton ( qui incarne aussi le rôle de Falstaff) de dire avant d’être un roi, c’était quelqu’un qui était loin de ce monde, qui profite de la vie. C’est un moyen d’avoir de la sympathie pour le personnage. Cette sympathie pour le personnage elle marche une fois qu’il devient Henry V. Sa première volonté c’est de ne pas être comme son père et d’essayer de faire la paix avec tout le monde. En faisant ce choix, c’était un moyen pour le film, de rendre Henry V extrêmement sympathique.



Robert Pattinson vs Thimothée Chalamet



En parlant de Timothée Chalamet, ce n’est pas nouveau ce genre de prestation de sa part, mais ça lui permet de passer un nouveau cap et on ne le verra plus comme une révélation depuis « Call Be my Your Name« , mais comme une confirmation. Confirmation, car c’est ce qui se ressent dans sa prestation, il y a une certaine maturité quand on voit Timothée Chalamet, surtout dans la dernière partie du film, on voit tout d’un grand acteur sans qu’il soit obligé de montrer qu’il sait jouer. On retiendra surtout son discours avant la bataille d’Agrincourt. Quand on l’entend, on a cette impression d’y être et cette envie de combattre pour le jeune roi d’Angleterre.


On a tendance à dire que tout le film repose sur la grosse prestation de Thimotée Chalamet, mais il n’y a pas que lui. On peut aussi parler de Robert Pattinson, lui aussi, a l’habitude d’enchaîner les très bonnes performances en plus de jouer dans de bons films depuis quelques années. Robert Pattinson joue le fils de Charles VI : Louis de Guyenne. Beaucoup de gens diront que son accent français est détestable, mais je trouve que c’est cohérent avec la vision de David Michôd et Joel Edgerton de faire quelqu’un de prétentieux, d’arrogant, parfois ridicule et toujours cette volonté d’humilier l’adversaire et cela permet de rajouter une corde à l’arc de Robert Pattinson remplissant le rôle avec beaucoup de brio.


Pour parler des libertés prises par le film, toujours en rapport avec la pièce de théâtre, il faut parler du personnage de Joel Edgerton (Falstaff). Le point commun entre la pièce et le film, c’est cette amitié entre Hal et Falstaff. Comparé à la pièce, Falstaff va continuer à suivre Hal, on comprend très vite que c’est un soutien important pour le jeune roi d’Angleterre, l’occasion de dire que notre meilleur conseiller c’est notre meilleur ami qu’on a connu avant d’être roi. Il sera très important dans cette bataille et j’ai trouvé que c’était intéressant de le mettre comme un point important de la bataille et du film. Quand je revois son personnage et son duo, c’est un exemple d’amitié et de fidélité surtout à cette époque, ce n’était pas évident de trouver quelqu’un de fidèle.



La bataille que j’imaginais



Il y a ce reproche fait au film comme quoi il serait long, c’est aussi la principale critique qu’on peut émettre envers les films historiques. Parfois c’est pertinent, parfois quand on n’aime pas trop un film historique on a tendance à dire qu’on n’a pas trop aimé, car c’était long. Pour ce dernier point on est plutôt sûr de la critique gratuite, quand parfois on manque d’argument pour parler de ce genre de film. L’ennuie dans « le roi » on ne le ressent pas trop, quand on sait que la bataille d’Agrincourt n’est pas le point central du film, c’est un point important du film, mais si on l’attendait comme l’élément central du film on sera automatiquement déçu, surtout sur la fin de cette bataille, il y a un sentiment de frustration qui arrive et on se dit que cela aurait mérité de durer plus longtemps. Quand on est plus dans une optique de suivre l’ascension du jeune roi anglais, on est sur un film plutôt divertissant, ou les événements vont s’enchaîner entre sa vie loin du trône, la mort de son père, le début de son règne, la bataille d’Agrincourt. Je ne vais pas citer tous les moments du film, mais on ne va jamais rester bien longtemps, à part pour la bataille d’Agrincourt qui aurait pu mériter 10-15 minutes de plus, mais on sent la volonté de Michod et de Joel Edgerton de ne pas faire un focus sur cette bataille, mais plus de parler de l’importance de cette bataille dans l’histoire de l’Angleterre et d’Henry V.


« Le roi » est un film divertissant, avant d’être historique, mais ce côté historique est très discutable, on en parlera très vite. S’il arrive à être divertissant c’est surtout grâce à cette bataille, qui le moment le plus intéressant, avec un plan séquence qui nous montre tout l’impact d’une bataille avec le manque de place, le stress, tout ce plan nous montre ce qu’est exactement une bataille . Une fois qu’on voit ce plan, on est à fond dans cette bataille. Rien qu’avec ce plan, ce film aurait mérité une sortie traditionnelle en salle, mais on est conscient de l’état de cette industrie et surtout de la petite vie qu’aurait eu ce film en salle.


La bataille est très intéressante pour le côté reconstitution, ils ont filmée cette bataille en deux semaines avec 300 hommes et 80 chevaux en Hongrie, ils ont laissé l’équipage et les chevaux ont écrasé le champ, pour obtenir un champ boueux. Ce résultat marche énormément, on voit un champ de bataille pas du tout pratique, une bataille difficile ou toutes les pertes sont importantes surtout quand on est en infériorité numérique. Enfin la guerre c’est une histoire de stratégie et de stratégie sur le long terme, on est loin d’être sur une bataille rapide. Cette bataille nous aide vraiment dans l’immersion du film et quand on est fan ou même grand amateur de l’époque médiévale, surtout quand il s’agit de bataille, on est bien servis et c’est exactement à quoi ce que j’attendais. Pour ce qui est du costume c’est le côté cliché médiéval qui ressort, on est sur des couleurs grisâtres, rien de plus, à croire qu’on pensait que la couleur n’existait pas à cette époque alors que ce n’était pas forcément le cas.


On sera tous d’accord pour dire d’un point de vue divertissement c’est un bon film, la bataille est satisfaisante d’un point de vue cinéma, pour ce qui est du côté historique, je crois qu’on c’est trompé de porte, on est loin d’être sur la véritable histoire d’Henry V. Netflix aurait dû dire que c’est une adaptation de la pièce de théâtre de Shakespeare, histoire d’enlever le débat sur le côté historique.



Pour le côté historique on repassera plus tard



Pour parler des soucis d’un point de vue historique, je vais évoquer quelques points en spoilant le film, si vous voulez ne rien savoir, je vous donne rdv en conclusion.


Commençons d’abord avec cette fin de bataille se finissant avec la mort du prince de Guyenne. Ce n’était pas forcément le cas dans les faits, car il n’a pas pris part à la bataille.


Le film a tendance à nous montrer un roi très pacifiste et humaniste, mais ce n’est pas du tout le cas. On parle d’un roi agressif et sournois. Pour la politique intérieure, on est sur la carte de l’apaisement entre les rebelles gallois et les opposants à son père : Henri IV qui avait pris le pouvoir de façon illégitime. Quand il est en dehors de son royaume, c’est limite si on a affaire à un tyran. Par exemple, lors de la bataille à Azincourt, il ordonna l’exécution de nombreux prisonniers ce qui enfreint les codes de la chevalerie. Le film va l’évoquer rapidement, mais le film ne dira pas que certains prisonniers étaient rassemblés dans des granges, ils étaient brûlés vifs.


Enfin, on va parler de la fin, une fin en mode conte de fée ou tout est bien qui finit bien et nous permet d’avoir une belle fin. Dans les faits ce n’est pas du tout une belle fin. Après ses conquêtes militaires et la signature du traité de Troyes en 1420, lui permettant d’être l’héritier de Charles VI sur le trône de France, Henry V n’a pas eu le temps de profiter de la France et laissa comme héritier un bébé de neuf mois de son mariage avec Catherine de Valois : fille de Charles VI. Le soucis c’est qu‘Henry VI a les mêmes troubles mentaux que son grand-père maternel. Il est incapable de régner et laissa les rênes du pouvoir à ses oncles : les ducs de Bedford et de Gloucester. Après leurs mort, le royaume se divisa en deux factions : Les York et les Lancastre, ils se livrent une violente guerre civile et Henry VI fut destitué deux fois, une fois en 1461, l’autre en 1471, date de sa mort, ou il fut emprisonné à la Tour de Londres


Pour finir je vous propose quelques articles de Yann Fossurier sur le sujet :



Si l’on oublie le côté historique, « Le roi » est un film qui réussit tout ce qu’il entreprend et devrait plaire aux nombreuses personnes friands de cette époque, quand on est conscient qu’on est loin de la réalité. En dehors de ce problème, le deuxième film « historique » de Netflix est une réussite et ce genre de film pourrait être une stratégie importante dans cette bataille.

Eyrio__
7
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le 24 nov. 2019

Critique lue 450 fois

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