Le Témoin du mal par SnakePlissken
Dans la série "film que tout le monde trouve banal sauf moi", je voudrais "Le Témoin du Mal".
On va commencer par ce qui fâche et sur lequel tout le monde est d'accord : oui, on sent que le film n'a pas bénéficié du budget d'un blockbuster, on se demande s'il ne s'agissait pas à l'origine d'un téléfilm qui aurait atterri au dernier moment dans les salles obscures en franchissant de peu la barrière qualitative séparant les deux mondes, et enfin le sympathique tâcheron Grégory Hoblit (Fréquence Interdite, Intraçable) ne fait pas vraiment d'étincelle derrière la caméra.
Mais même une fois que l'on a dit tout cela, la puissance du concept exploité par le film et le sérieux avec lequel il le traite, indifférent aux rires goguenards que ne manqueront pas d'émettre certains fans du quatrième degré sur certaines scènes pourtant parfaitement logiques, suffisent à effacer tous ces défauts.
Les lecteurs du roman "L'Echiquier du Mal" de Dan Simmons se souviendront peut-être comme moi d'un passage hallucinant d'angoisse et de chaos où deux personnages sont pourchassés impitoyablement et inlassablement par des esprits malfaisants prenant successivement possession de toutes les personnes présents dans un rayon de 100 mètres. A ma grande surprise, à ma connaissance, ce thème n'a quasiment jamais été repris au cinéma. On peut penser à la scène de l'autoroute de Matrix Reloaded, mais tout caractère horrifique est abandonné au profit de l'action pure. Et à quelques épisodes de série télé.
Non, le seul film qui m'a fait ressentir une fraction de la terreur que j'ai ressentie en lisant ce passage du livre de Simmons, c'est "Le Témoin du Mal". Évidemment, compte tenu de ses moyens, les enjeux du film sont bien moindres, mais conscient de ses limites, il maîtrise ses ambitions, et sa vision noire et sans concession, assumée jusqu'à la dernière minute, sont pour beaucoup dans sa réussite à mes yeux.