Une oeuvre magistrale, indéniablement mais devant laquelle je suis tiraillée entre l'admiration pour le metteur en scène, la maigreur effrayante du scénario, la grande qualité de beaucoup de gags, et la profonde irritation devant les grimaces incessantes du comédien. Est-ce une barrière culturelle qui fait que le comique de Jerry Lewis divise autant les spectateurs français ? Il n'est peut-être jamais aussi clairement dérangeant que dans cet énorme déclaration d'amour et de haine, cette ode répulsive à la femme, endiablée et agaçante au plus haut point.
Herbert H. Heebert, foudroyé, le jour de la remise des diplômes, par la découverte de l'infidélité de sa high school sweetheart, jure de rester à jamais célibataire et quitte ses parents pour vivre sa vie. Première grosse métaphore, premier effet comique lourd et dérangeant, Lewis joue à la fois le rôle du fils et de la mère éplorée, peinturlurée comme un clown, louchant et bavant dans son mouchoir. Cut.
Et qu'est-ce que cet homme enfant révulsé par les femmes va-t-il trouver comme travail ? Homme à tout faire, bien entendu dans une pension accueillant une armée de jeunes comédiennes, musiciennes, danseuses en devenir. Apparaît alors l'un des personnages les plus importants du film, l'immense maison-utérus faisant office de gynécée. C'est par son grand escalier central tapissé de moquette framboise, en forme d'appareil génital féminin, que le pauvre Herbert essaiera par deux fois de s'échapper alors que la meute des filles en furie le repousse à l'intérieur. Grosses métaphores n°2 et 3. Non mon fils, tu ne grandiras pas.
C'est dans un décor et un dispositif incroyable de maison de poupée grandeur nature que ce pauvre Herbert est donc délicieusement contraint à rester. Et comment lui en vouloir, dès lors, d'être aussi stressé, grimaçant et stressant, aussi maladroit et à côté de ses pompes, avec toute cette énergie sexuelle à refouler et tous ces symboles freudiens à dépasser ? La scène du réveil des filles en travelling est exceptionnelle. La suite est un film à sketch inégal, les gags les plus longs étant souvent, comme le veut l'adage, les moins bons. Avec l'espoir d'entrevoir entre deux le visage de Jerry Lewis non contracté par un spasme. Avec, comme dans The Nutty Professor, un passage plus mélancolique qui invite à découvrir une douce détresse sous le masque du clown grimaçant.
A voir donc pour les prouesse techniques, les chorégraphies domestiques et pour la mise en scène, pour les couleurs qui font mal aux yeux, et parce que si cet humour laisse froid un spectateur sur deux, ça fait hurler de rire le second. Ce serait dommage dans ce cas de passer à côté.
Hodor
7
Écrit par

Créée

le 8 juil. 2013

Critique lue 530 fois

8 j'aime

Hodor

Écrit par

Critique lue 530 fois

8

D'autres avis sur Le Tombeur de ces dames

Le Tombeur de ces dames
Pom_Pom_Galli
1

Critique de Le Tombeur de ces dames par Pom_Pom_Galli

Jusqu'ici, je ne connaissais de Jerry Lewis que "Doctor Jerry and Mr. Love" et surtout "la valse des pantins". Deux très bons films, donc. Mais avec "le tombeur de ses dames", je ne sais pas si...

le 29 nov. 2013

9 j'aime

Le Tombeur de ces dames
Hodor
7

Homme sweet homme

Une oeuvre magistrale, indéniablement mais devant laquelle je suis tiraillée entre l'admiration pour le metteur en scène, la maigreur effrayante du scénario, la grande qualité de beaucoup de gags, et...

le 8 juil. 2013

8 j'aime

Le Tombeur de ces dames
greenwich
9

Le tombeur de ces dames (1961)

Stanley (J Lewis) est une jeune homme traumatisé par un échec sentimental et il a peur des femmes. Ce film raconte la guérison d'un personnage névrosé. Au départ il est complètement dominé, c'est un...

le 8 mars 2014

6 j'aime