Le pilier de la maison

On a bien du mal à trouver dans le tout premier film de Pabst une spécificité qui annoncerait ce pour quoi son cinéma (des années 20 principalement) est devenu célèbre. Tout juste peut-on retrouver un côté un peu sale dans la description faite de la famille de fondeurs de cloche, en écho au boucher de "La Rue sans joie" — l'acteur est d'ailleurs commun aux deux films, Werner Krauss. "Le Trésor" est un muet très classique, au sens presque anodin du terme, reprenant des péripéties très élémentaires pour structurer un récit sur le thème de la cupidité. D'un côté, les artisans dépeints comme des êtres iniques, de l'autre un jeune homme travailleur itinérant amoureux de la fille du patron. Lorsqu'une rumeur de trésor caché au sein de la maison / entreprise se faufile dans les lieux, c'est le point de départ d'un déchaînement de méfiance, d'égoïsme et de malveillance.

Clairement ce n'est pas l'histoire qui passionne. L'artisanat en question n'est pas développé, la romance entre les différentes parties avance mollement et de manière opportuniste. C'est surtout l'influence de l'expressionnisme allemand qui permet au film de trouver quelques belles figures, à l'instar du pilier central qui charpente autant le film que la maison — symbole central qui conduira les artisans cupides à leur perte. C'est presque un film qui observe les différentes réactions à l'apparition d'un gros magot faisant office d'appât (la maison s'effondrera à la fin, comme un piège refermé sur lui-même, lorsqu’un idiot cherchera un trésor supplémentaire dans la structure porteuse de la maison). Le récit est circonscrit presque intégralement à l'intérieur et aux abords de la fonderie, et fait référence explicitement à une date de l'histoire de la Slovénie, 1683, l'année de l'expansion de l'Empire Ottoman.

Le jeu des contrastes entre les deux groupes, les amoureux et les cupides, est assez pauvre, même si l'obsession des "méchants" donne lieu à quelques belles scènes gothiques. Le parallèle argent / sexe, le trésor en échange des faveurs d'une femme, reste à l'état d'ébauche. Quand ils trouvent le coffre secret, un plan de lait sur le feu bouillant donne un aperçu des ennuis à venir par exemple, là où les deux amants s'en vont tranquillement dans la campagne locale entourés de fleurs et de papillons.