Légitime violence n’est pas un vigilante à la française. Pas du tout. C’est au contraire un pur polar à la française agrémenté d’enjeux politiques. Ainsi que ceux qui attendent que Claude Brasseur nous fasse du Bronson passent leur chemin, ils seront déçus. Claude Brasseur interprète davantage un type paumé (et on peut le comprendre) après le traumatisme qu’il vient de vivre et qui se retrouve, malgré lui, pris entre plusieurs feux (une police qui s’intéresse surtout à une autre mort dans la fusillade, une milice qui en vient à s’accaparer sa souffrance et des voyous dépassés par l’affaire dans laquelle ils sont impliqués). Le résultat évoque le cinéma d’Yves Boisset. Un peu rentre-dedans, renvoyant dos à dos tous les protagonistes ou presque, on sombre parfois dans la caricature et l’outrance (le traitement, notamment, de l’association d’autodéfense avec un Roger Planchon qui en fait des caisses), mais un sentiment d’efficacité domine.


Plus largement, le film illustre tout à fait le néo-polar français des années 80 avec l’implication de polices parallèles qui fait écho au cinéma américain des années 70. Contrairement à l’idée souvent reçue, il s’agit d’un cinéma vraiment de gauche qui critique vertement les notions d’auto-défense et de police parallèle, comme c’est le cas ici. Un cinéma qui critique de façon évidente le SAC qui avait été mis en place sous de Gaulle. En 1982, alors que la peine de mort vient juste d’être abolie et que les méthodes policières évoluent, le film colle à l’actualité. On peut comprendre que le propos ait moins de résonnances des décennies plus tard. Cependant c’est un témoignage intéressant de l’époque et il est dommage que le film soit devenu aujourd’hui si confidentiel.


C’est d’autant plus dommage que l’interprétation est globalement un atout évident. Claude Brasseur parfait dans un rôle complexe, Michel Aumont toujours magistral et Christophe Lambert pas encore vedette régalent tous les trois. Dans un rôle à contre-emploi, Thierry Lhermitte n’est pas toujours convaincant mais son personnage est mal écrit (son attirance pour sa sœur rend ainsi totalement perplexe). Quant à Véronique Genest, qui tient un rôle essentiel dans l’histoire, elle n’est malheureusement pas au rendez-vous. C’est dommage car cela gâche pas mal de choses. Mais le film se tient bien avec son ambiance grise, ses personnages troubles, son pessimisme et sa violence. Un film nerveux et efficace qui, s’il n’échappe pas à la caricature, mériterait d’être réévalué.


6,5/10

Play-It-Again-Seb
7

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le 30 janv. 2024

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PIAS

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