Andrew Niccol se perd dans la machinerie hollywoodienne pour adolescents

Il n’y a pas à dire : avec les adolescentes, l’auteure Stephenie Meyer a trouvé le bon filon avec sa saga littéraire Twilight, qui a perduré au cinéma via cinq longs-métrages. Mais la romancière ne s’est pas seulement contentée d’une romance au pays des vampires et des loups-garous. Elle s’est également aventurée dans le milieu de la science-fiction avec The Host (Les Âmes Vagabondes en VF). Et qui, après le succès commercial des Twilight, se retrouve à son tour adapté sur le grand écran, dirigé par un réalisateur qu’il est étonnant de voir aux commandes d’un tel projet. Et pour cause, il s’agit d’Andrew Niccol, le cinéaste à qui nous devons Bienvenue à Gattaca, Lord of War et le scénario de The Truman Show. Mais justement, son travail sur un tel film peut-il faire sortir ce dernier du statut de teenage movie à l’eau de rose qui lui collait déjà à la peau bien avant le jour de sa sortie ?

Dans un futur proche, la Terre a été envahie par des extra-terrestres. Des « âmes » qui ont la capacité des prendre possession des corps des êtres vivants, à savoir ici celui les humains comme Mélanie (Saoirse Ronan). Une jeune fille qui fait partie de la résistance, un groupe d’hommes et de femmes qui vivent reclus, à l’abri des envahisseurs. Seulement, l’esprit de Mélanie est toujours présent et tente de donner raison à l’ « âme » qui la contrôle, appelée Vagabonde. Afin de prendre soin du petit frère de Mélanie, Jamie (Chandler Canterbury), et de son petit-ami Jared (Max Irons). Mais ne pouvant directement se manifester, Mélanie aura bien du mal à convaincre les résistants qu’elle est toujours présente dans ce corps et de faire gagner la confiance de Vagabonde auprès d’eux. Tandis que cette dernière se retrouve désormais prise en chasse par La Traqueuse (Diane Kruger), une alien cherchant désespéramment le repaire des résistants et qui voyait en Vagabonde le moyen de l’y conduire.

Ce qui faisait peur avec Les Âmes Vagabondes, c’était de refaire face à une énième version de Twilight, cette fois-ci dans le domaine de la science-fiction. Qui proposait une histoire d’amour niaise au possible, avec son lot de personnages qui n’usent que de leur physique pour crever l’écran (et encore, c’est un bien grand mot !). D’autant plus que Roméo & Juliette est une œuvre qui a été adaptée sous bien des formes (Twilight, toujours Twilight…) et que l’on commence sérieusement à en avoir marre. Aussi surprenant que cela puisse paraître, Les Âmes Vagabondes s’éloigne de tout cela. Non pas que le récit évite la romance, mais que celle-ci se trouve véritablement originale et intéressante à suivre (notamment due au fait que Mélanie est amoureuse d’un homme mais qu’elle ne peut se manifester alors que Vagabonde tombe sous le charme d’un autre, obligeant donc Mélanie à vivre cet amour dont elle ne veut pas). Et qui ne fait jamais l’éloge des jeunes gens purs (pas de coucherie avant le mariage, que des répliques romantiques sur le bout de la langue…), ce qui se montre bien plus réaliste. Le tout sur fond d’un paysage de science-fiction fort sympathique. Et qui offrait à Andrew Niccol, qui a déjà prouvé son talent à dresser un univers pour mettre sur le devant de la scène les valeurs humaines, de bien grandes perspectives. Alors, quand il se présente également comme le scénariste du film, nous ne pouvons que pousser un grand « hourra » de satisfaction !

Mais n’oublions pas qu’avant cette adaptation, Andrew Niccol s’était chargé de Time Out. Un film d’anticipation fort intelligent sur le papier (qui reposait littéralement sur le principe « du temps, c’est de l’argent »), qui s’est finalement révélé n’être qu’un banal Robin des Bois sans intérêt. Du coup, la notoriété de Niccol en prit un coup, et cela se confirme malheureusement avec Les Âmes Vagabondes. Alors qu’il avait tout un univers à exploiter rien que pour lui, il préfère le mettre de côté (ainsi que plusieurs personnages du livre) pour s’intéresser excessivement à la romance inventée par Stephenie Meyer. Même si cette dernière possède bien plus d’intérêt que celle de Twilight, elle occupe au moins 75% du film, ce qui en fait un blockbuster pour adolescents un brin longuet et dans lequel il ne se passe rien. Du coup, nous nous retrouvons à s’ennuyer devant une adaptation qui ne propose pas vraiment de bons acteurs à se mettre sous la dent et quelques détails qui feront grincer des dents. Comme la voix de Mélanie, qui énerve plus qu’autre chose.

Sans compter qu’un conteur tel qu’Andrew Niccol ne pouvait chuter dans le cliché le plus bas de gamme qui puisse exister, ce qu’il fait malheureusement. S’il avait montré des signes de faiblesse lors de Time Out, il touche le fond avec Les Âmes Vagabondes, n’évitant pas des séquences romantiques dignes des plus niaiseuses cartes postales au monde : le couple s’embrassant devant un coucher de soleil, ce dernier prenant le temps de se bécoter sous la pluie... Et en sachant que le réalisateur est à la barre du film, nous ne pouvons qu’être extrêmement déçus du résultat alors que beaucoup d’atouts étaient en jeux, et qui attendaient d’être exploités de la meilleure des façons.

Au lieu de cela, nous nous retrouvons avec un Andrew Niccol qui s’est quasiment perdu dans la machinerie hollywoodienne pour ados et qui n’arrive plus à s’en détacher pour toucher son cachet, au point de faire un pur produit de production. Allant même jusqu’à essuyer un nouvel échec commercial, malgré la réputation de la romancière. Vraiment, il pouvait en tirer quelque chose des Âmes Vagabondes ! Malheureusement, le film est tellement long et cliché que la pilule a bien du mal à passer, malgré les bonnes idées qu’offraient l’univers du livre et une mise en scène qui n’est jamais aussi prétentieuse que n’importe quel teenage movie. Un bien beau gâchis…

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