Malgré une filmographie d’une quarantaine de films, le réalisateur français Willy Rozier (1901-1983) est assez peu connu. Il n’a pas de biographie sur sa page Wikipedia ou Allociné, et celle sur Imdb commence par « bien que scénariste, il n’était pas très doué pour faire des films ». C’est gentil. Il faut creuser un peu pour en savoir plus, quelques autres sites plus confidentiels dressent le portrait d’un réalisateur assez atypique, à la fois grand public mais aussi en marge du milieu. Bach films le fera sortir de l’ombre dans les années 2010 par des éditions en DVD de quelques uns de ses films. Malheureusement, ces anges noirs ont peu de chance de redonner à Willy Rozier son lustre perdu.


Le film est l’adaptation du roman de François Mauriac de 1936, avec quelques grandes libertés. Mais l’idée est la même, montrer la face noire de la bourgeoisie de province. Autour de la question de terres landaises et d’un château, deux familles s’opposent entre elles pour mieux marier leurs enfants ensemble. Les ambitions sont égoïstes, les petites machinations rongent tout le monde, mais personne ne veut lâcher prise.


La mesquinerie de l’âme humaine est centrale. Elle se trouve dans l’avidité de ces familles, mais aussi dans le comportement des petites gens qui ont décidé de se moquer et tourner en bourrique le curé. Ce dernier, qui accueille sa sœur, est accusé de vivre avec sa concubine. Le prêtre restera stoïque et digne, face à cette rumeur populaire insidieuse, et les distractions moqueuses de la population.


Le film illustre bien cette vie de province, à la campagne, avec ces gueules de paysans, leurs habitations et autres particularités pittoresques qui ont disparu. Le film garde une trace de ce mode de vie, probablement sans le vouloir. Mais ce côté du petit peuple est vite balayé quand l’intrigue se resserre sur cette demeure familiale où se joue le drame de la médiocrité ordinaire.


Tous ont des secrets et des ambitions qui ne les honorent pas. Même les jeunes promis, s’ils sont les personnages les plus innocents du film, sont partie prenante de ce mauvais jeu, bien que plus souvent contre leur gré. Il y a tout de même la figure qui se distingue du père du possible fiancé, l’ambitieux Gabriel Cardère, joué par Henri Rollan. Arriviste et manipulateur, il a toutefois l’honnêteté de reconnaître ses défauts à son fils. Les autres personnages manquent de caractère et le film est parfois confus sur certains points. Le sac de nœud des petites manipulations a du mal à se défaire.


Hormis cette scène glaçante dans la forêt qui viendra endeuiller le film, Willy Rozier peine à insufler de la tension. S’il s’échine à présenter les mauvais côtés de ses personnages, cette histoire d’avidité et de peur de dépossessions manque aussi de relief. Les anges noirs se veut critique, il est grossier, la médiocrité se retourne contre lui.


Heureusement pour Willy, il y a d'autres films plus intéressants à retrouver dans sa filmographie, tels que Champions de France (1938) voire Monsieur chasse (1947).

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le 1 mai 2020

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