Dernière collaboration de Jean Epstein aux studios Albatros, "Les Aventures de Robert Macaire" adopte un format extrêmement étonnant au regard de leur passif mutuel : c'est un film d'aventure au très long cours, qui s'étend sur près de 3h30, épousant la forme d'un serial plutôt classique et tourné essentiellement en décors naturels. Exit donc les costumes en cartons et les plateaux de tournage parisiens : voilà l'histoire de deux bandits de grand chemin sous la Restauration, en 1825, Robert Macaire et son fidèle compagnon Bertrand.


Avec son découpage en 5 grandes parties, une grande ellipse temporelle séparant les trois premières des deux dernières, il est bien difficile de rattacher un tel récit portant sur le vol de riches aristocrates et le sauvetage de châtelaines en détresse à l'œuvre d'Epstein. Le film regorge d'un humour constant, propre au genre mais tout à fait exotique au sein de sa filmographie, mis à contribution pour dépeindre toute la facétie de leurs aventures. À commencer par cette fermière réticente à se montrer généreuse à leur égard (elle leur refuse un repas contre l'avis de son enfant), qu'ils viendront détrousser plus tard en exploitant sa fibre superstitieuse : Saint Antoine et son cochon feront des miracles. On le sent tout de suite : on se situe à des années-lumière du mélodrame auquel il avait pu nous habituer.


Le film se structure principalement autour d'une histoire de déguisement, le héros se faisant passer pour le vicomte de la Tour Macaire. Jean Angelo en fait alors des tonnes dans le registre du grand bourgeois affable, y compris lors de la séquence d'un grand bal donné en son honneur — qui finira par un encerclement policier. Malgré ce ventre mou un peu soporifique, il flotte sur l'ensemble un air par moments anarchiste, dans la raillerie de la bigoterie, de l'autorité militaire, de la bourgeoisie et du patriotisme. Le duo n'est pas dénué d'un certain panache, jusque dans l'ultime et tendre séquence : les deux amis vieillissants, en haillons comme au tout début, se volent l'un l'autre avant de continuer leur chemin, en riant.

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le 8 nov. 2020

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Morrinson

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