il n'y a pas qu'un seul modèle de famille...et de bons sentiments peuvent aussi faire un bon film.

Ce matin, je me suis levé sans l'intervention de mon alarme. C'est rare. Pourquoi ce réveil spontané ? Parce que ce film vu la veille me trottait toujours dans la tête. Seul un film qui a touché l'une de mes cordes sensibles peut me faire un tel effet. Alors pourquoi? J'y ai réfléchi pendant toute la fin de ma nuit.

Un réalisateur Japonais connu qui fait un film coréen, rien que cela attisait ma curiosité...déjà naturellement attisée par tout ce qui touche à la Corée. Avec un groupe d'amis et l'un de mes fils qui avons la même passion, nous avions décidé de passer une soirée coréenne, avec un resto + le film. Le resto, il faut l'avouer, nous a merveilleusement mis en condition pour bien accueillir la projection.

Le film commence dans le style d'un roman comme les Misérables. Il pleut des cordes, dans un quartier un peu miteux de Busan. Une frêle silhouette féminine dépose un nourrisson devant (et pas dedans) une boite à bébés. La boite est surveillée par deux policières en planque. L'une des deux file ensuite la mère, mais la perd en chemin, pendant que l'autre place le bébé dans la boite et surveille les personnes qui la gère, car elle sont soupçonnées de trafic d'enfants. Il s'agit donc de prendre les auteurs en flagrant délit d'une vente. Et c'est bien ce qui se trame, les deux hommes de garde pour la boite à bébés sont visiblement intéressés par la vente de l'enfant. La mère a juste laissé un mot avec le nom de l'enfant et un "je reviendrai" auquel les deux hommes ne croient pas. Mais voilà, dès le lendemain, la mère revient bien pour revoir son enfant... Les deux hommes essaient de ne pas se la mettre à dos, chose finalement facile car elle semble également intéressée par l'argent. A partir de là, elle s'associe aux deux "courtiers" (Broker, pour le titre en anglais) comme ils se définissent eux-mêmes, afin de trouver un couple prêt à payer pour l'enfant. Jusque-là, on est toujours dans Les Misérables. Mais ensuite, le film prend un virage en douceur vers une sorte de road movie cathartique pour les protagonistes principaux, policières comprises. Car d'un film d'enquête sur d'horribles trafiquants d'enfants supposés, on se dirige vers une vraie quête commune pour trouver un avenir à cet enfant de moins en moins abandonné (et tant mieux si on peut gagner un peu d'argent au passage, ce ne sont pas des saints non plus, et la vie est dure pour eux).

Finalement, le fil conducteur du film, c'est la famille, celle qu'on se créée, pas celle dont on hérite. A la base, les personnages sont tous des "sans famille", soit parce qu'ils n'en ont jamais eue, ou soit parce qu'elle est dysfonctionnelle. Au final, ils finissent par former ensemble une communauté protectrice, comme l'est en principe une famille.

On peut trouver que le cinéaste est un peu naïf à ce point de vue, mais on peut aussi comprendre l'histoire comme étant une forme de conte moderne, avec sa morale finale. C'est comme cela que je l'ai ressenti pour ma part. Certes, ici, ils ne se marièrent pas et n'eurent pas beaucoup d'enfants, ...mais ils firent ce qu'il faut pour l'avenir de l'enfant mal né.

Parfait, le film ne l'est pas, mais ça n'a rien enlevé à l'effet qu'il a produit sur moi. Si on veut lui trouver des défauts, on peut par exemple citer l'enquête, complètement déconnectée de la réalité du travail policier. Mais voilà, dans les contes aussi, le Prince Charmant est un modèle de prince impossible à trouver dans le monde réel... et tout le monde s'en fout, car ce n'est pas ça l'important dans l'histoire.

Côté casting, c'est impeccable. On connaît la palme reçue à Cannes par Song Kang-ho pour ce film, mais les autres acteurs sont tout aussi bons, à commencer par la chanteuse & actrice IU en jeune mère consciente de ses limites. Si vous n'avez pas vu la série coréenne My Mister, je vous la recommande vivement, elle y est aussi excellente dans un rôle un peu similaire. On retrouve aussi Doona Bae, en policière, qui est une actrice très sollicitée aussi bien en Corée que pour des fictions internationales (voir Sense8 par exemple). Son jeu est toujours juste, c'est encore le cas ici.

Je n'ai pas vu tous les films de Hirokazu Kore-eda, mais tant qu'on parle de famille, je le situe lui dans celle de réalisateurs comme Ken Loach ou les Dardenne. Des réalisateurs qui racontent l'histoire de gens qui n'ont pas la vie facile, et qui ont une énorme empathie pour leurs personnages. C'est une raison suffisante pour moi pour assumer ma note et mon coup de coeur.

OlivierQuisquater
9

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le 9 déc. 2022

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