Braddock, Pennsylvanie à la veille de l’élection de Barrack Obama. Cette modeste commune survit grâce à l'industrie, au travail de la métallurgie et du charbon. Dans ce contexte ouvrier rude, Russell Baze (Christian Bale) travaille sans relâche pour subvenir aux besoins de sa famille. Avec un père fortement malade après avoir travaillé toute sa vie à l'usine, une mère décédée et un petit frère Rodney (Casey Affleck) traumatisé par la guerre en Irak, Russel sert de pilier et de voix de raison. Sa bouffée d'air frais, Lena (Zoë Saldana) sa petite-amie.
Jusqu'au jour où il provoque un accident et tue un enfant. Russel part en prison et est alors écarté de sa famille, de la vie qui s'écoule sans lui et devient le témoin passif de sa chute. Il voit sa propre vie défiler sous ses yeux, il peut presque la toucher mais elle lui échappe. Il purge alors sa peine pour son crime, sans sourciller.
- Mais l'horloge ne va pas s'arrêter de tourner.
Pendant un instant c'est au tour de Rodney de prendre la place de son frère, chaperonné par John Petty (Willem Dafoe), un truand bienveillant - paternel. Désorienté depuis son retour d'Irak, il s'aventure dans les combats clandestins - et truqués. Il frappe. Frappe encore. Frappe toujours contre ce pays qui l'a traumatisé. Jusqu'à sa rencontre destructrice avec Curtis DeGroat (Woody Harrelson) - symptôme vivant de cette société meurtrie emplie de violence - pour un aller sans retour.
"J'ai donné ma putain de vie à ce pays ! C'est pas assez ? Et il a fait quoi pour moi ?"
Scott Cooper nous propose une immersion crue(lle) et saisissante dans le quotidien abimé par la crise économique, la mondialisation et la violence d'une Amérique souvent délaissée - muette.
- Jusqu'à l'injustice de trop.
Les Brasiers de la colère offre comme fil rouge la dualité. Deux frères. Deux destins. Deux morts (l'une réelle, de Rodney et l'autre symbolique, de Russel le juste). Deux enfants perdus (l'un tué dans l'accident et l'autre à venir de Lena). Deux mondes. Deux justices (la loi du Talion contre la loi des tribunaux). Deux lois (celle du coeur contre celle de la raison).
Le film s’apprécie comme un poème dans lequel Christian Bale signe ici l'une de ses plus belles interprétations. L'incommensurable profondeur de ses regards brulants et tourmentés en disent tout autant, si ce n'est plus que ses dialogues, appuyés par une caméra suspendue à chacune de ses émotions.
A la fin de ce film on retient donc l'itinéraire douloureux de cet homme droit, altruiste, juste, qui se laisse envahir par la colère face à ce sentiment d'injustice qui l'a poursuivi toute sa vie.
"Je t'aime frérot. Moi aussi je t'aime."