Amour, gloire et pédalier
Avec près de 3 millions d’entrées, Les Cracks d’Alex Joffé fut l’un des plus grands succès de l’année 1968 en France. Pourtant, le film est aujourd’hui bien mal connu, à peine ressorti lors de...
le 27 sept. 2025
4 j'aime
Avec près de 3 millions d’entrées, Les Cracks d’Alex Joffé fut l’un des plus grands succès de l’année 1968 en France. Pourtant, le film est aujourd’hui bien mal connu, à peine ressorti lors de rétrospectives sur le cyclisme au cinéma ou évoqué au sein d’une anecdote malheureuse, puisque c’est pendant le tournage du film que Bourvil, vedette au guidon, fut informé de sa maladie qui allait l’emporter deux ans plus tard.
Pourtant Les Cracks mérite d’être redécouvert, même si le film est une évocation d’une époque délicieusement désuète, puisqu’il prend place dans la France de 1901, de celle des premières grandes compétitions sportives et notamment de vélo. Il utilise ce cadre avec une grande vivacité, une évidente gourmandise qui évoque aussi le cinéma du début du siècle, avec un burlesque évident. Le film commence d’ailleurs comme un métrage en noir et blanc, avec inter-titres, avant de passer à une éclatante pellicule en couleurs. A quelques autres reprises le film s’amusera même de sa forme, incrustant encarts et même bulles pour une improbable conversation entre Bourvil et un cochon. Le réalisme de la Nouvelle vague est loin et on s’amuse.
Recréation française des films Ces merveilleux fous volants dans leurs drôles de machines et La Grande Course autour du monde (1965 tous les deux), le film d’Alex Joffé utilise donc le vélo comme moyen de locomotion et prétexte pour traverser une France champêtre bien mise en valeur (malgré quelques modifications avec la réalité). Bourvil est en selle, ou plutôt Jules Duroc, inventeur d’une nouvelle bicyclette moderne, annonçant les progrès en cours, obligé de concourir à la course Paris-Remo de 1901 afin d’échapper à un huissier tenace qui veut saisir son matériel, Maître Charles Mulot.
La dynamique du duo, entre Jules Duroc, fort en caractère, ingénieur plus prolo que col blanc, et Maître Mulot, sec et coriace, offre un bon coup de pédale à l’intrigue, toujours emportée par cette menace, qui sera tout de même transformée pour la deuxième partie, où il sera alors question de gagner la course. Robert Hirsch en huissier retors est excellent, aux manières rigides mais à l’exécution souple, tandis que le trio de vedettes est complété par Monique Tarbès, soit Delphine Duroc, la femme de son Jules, loin d’être une potiche, complice de Maître Mulot pour mieux aider son amour. Bourvil en homme du peuple malin et parfois acariâtre fait des étincelles, n’hésitant pas à s’affirmer face au Maître Mulot ou se vantant face aux autres coureurs de son vélo des mérites de son invention, sans grand succès.
Dans cette France revisitée à une époque sans soucis, hormis ceux qu’encourent Jules Duroc, Alex Joffé offre un film qui sent bon le grand air, l’appel du large (soit la prochaine étape). La traversée se fait essentiellement par les petites routes champêtres, boisées ou plus pentues, les différentes voies (avec même le chemin de fer présent) sont toujours intégrées dans le cadre de la caméra pour offrir des points de vue parfois saisissants, et on imagine bien un tournage physique. Quelques cascades notamment avec un train ou une descente bien expéditive se révèlent même assez spectaculaires.
En dehors de rares voitures qui ferment le cortège et du pauvre triporteur poussé par Delphine avec Maître Mulot à son bord en capitaine de bord un peu ridicule, les principaux témoins voire acteurs de cette course remplie d’embûches seront des vaches, des cochons, des chèvres, le plus souvent surpris de ces fous du volant. Les escales citadines ne montreront pas grand-chose des villes traversées, mais seront des points d’étape pour le scénario, ajoutant une nouvelle péripétie ou en préparant une autre.
Les Cracks n’a pas la pédale douce sur son rythme de croisière, bien au contraire. Il assume parfaitement ses personnages assez évidents, son scénario en ligne droite, car il profite de son ton proche du burlesque, de sa caricature plaisante de cette époque. Il pourrait apparaître comme daté, mais pourtant en étant ancré dans des temps lointains il ne s’en montre pas prisonnier, car la vivacité de ses dialogues ou de son humour visuel, et l’atemporalité de ses personnages naturels, en font une charmante comédie à redécouvrir de nos jours.
Créée
le 27 sept. 2025
Critique lue 8 fois
4 j'aime
Avec près de 3 millions d’entrées, Les Cracks d’Alex Joffé fut l’un des plus grands succès de l’année 1968 en France. Pourtant, le film est aujourd’hui bien mal connu, à peine ressorti lors de...
le 27 sept. 2025
4 j'aime
Commençons par être honnête : mettre sept points pour ce film, objectivement, est un poil exagéré, j'en ai conscience. Mais tout le monde le sait, il n'y a pas que la qualité du métrage qui compte,...
le 28 août 2013
4 j'aime
6
Les cracks, c'est un comédie burlesque sur le vélo à ses tous débuts (en 1901!), au moment où les hommes portaient tous de fines moustaches remontant au bout. Bourvil, inventeur d'un vélo...
Par
le 27 oct. 2014
3 j'aime
2
La Culture est belle car tentaculaire. Elle nous permet de rebondir d’oeuvre en oeuvre. Il y a des liens partout. On peut découvrir un cinéaste en partant d’autre chose qu’un film. Je ne connaissais...
le 2 avr. 2020
55 j'aime
13
Le film adaptant le comic-book culte de Brian aura pris son temps avant d'arriver en France, quatre mois après sa sortie aux Etats-Unis tandis que le Blu-Ray est déjà sur les rayons. Pourquoi tant de...
le 5 janv. 2011
44 j'aime
12
En 2015, adaptant le comic-book de Mark Millar, Matthew Vaughn signe avec le premier KingsMan: Services secrets une belle réussite, mêlant une certaine élégance anglaise infusée dans un film aux...
le 30 déc. 2021
40 j'aime
12