Les minets sauvages
Les minets sauvages

Film DTV (direct-to-video) de Jean-Daniel Cadinot (1984)

N'est-elle pas belle, cette affiche à la David DeCoteau ? Oeuvre de mauvais goût aussi curieuse que racoleuse, Les minets sauvages est un petit cas anecdotique du porno gay français, qui possède en fait la curieuse ambivalence de son sujet, donc l'intrigue est plutôt développée narativement. Il s'agit en effet de prendre pour cadre un établissement de redressement de jeunes délinquants, qui devient prétexte à un film de détention qui accumule les scènes de viol masculin plus ou moins consentants, tout en salissant les buts de réinsertion de la structure judiciaire (tous les représentants de la justice et les gardiens consomment du porno pendant leurs pauses). Bref, un enfer pour certains, un paradis pour d'autres, et la confusion dans l'esprit du spectateur, qui regarde par le trou de la serrure.


On quitte très vite le réel devant l'insistance de la caméra sur les scènes ouvertement suggestives (la fouille anale dans le détail précédant l'entrée dans le centre donne le ton), et on arrive dans le dur du sujet après une dizaine de minutes. Et il convient de dire que si la caméra ne nous épargne rien des détails de tous les abus, le contexte et la banalité des exactions (du moins dans l'imaginaire carcéral que le cinéma a développé) fonctionnent dans l'implication émotionnelle. Ce film a l'idée de génie de prendre pour prétexte le genre carcéral et de ne l'exploiter que sous l'angle homosexuel, réussissant alors à créer un peu de choc dans la très lourde exploitation du viol masculin. Mais encore faut-il avoir une petite motivation pour supporter les longues séquences de sodomie, qui cultivent toutefois l'esthétique sale et granuleuse des grands Vols au dessus d'un Nid de Coucou et autres Bad Boys nostalgiques. Malgré la naïveté totale du scénario et le convenu des séquences qui s'enchaînent (on sent qu'aucune transition ne vient instaurer de fluidité dans cette narration), les temps forts ont un léger impact émotionnel, et si l'obsession sexuelle de la caméra rappelle toujours qu'on est bien dans un porno gay, les petites tentatives de Cadinot pour renforcer le côté dur, très dur de son centre de redressement payent, et le résultat parvient aujourd'hui à s'extraire de la production quotidienne. Hélas sans vraiment s'assurer un destin cinématographique, mais méritant une petite place dans la mémoire communautaire. On aime la ré-insertion dans le milieu.


Jean Daniel Cadinot a continué à faire des films pornographiques entre hommes, et a obtenu une petite reconnaissance pour quelques oeuvres évocatrices : Aime comme minet (et on nous parle aujourd'hui des ravages de l'écriture phonétique) ou encore le jeu de piste (où il ne fait pas bon rester dans les fourrés quand la patrouille de scout est en vadrouille). Notons toutefois l'apparition de Pierre Buisson, qui se révélait nettement plus à l'honneur dans Aime comme minet, mais qui finira par mourir d'une overdose à 24 ans.

Voracinéphile
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le 25 févr. 2018

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