SensCritique a changé. On vous dit tout ici.

Attention, cet avis comporte ce genre de spoilers:


Tu m'étonnes qu'il y a de mauvais cultivateurs! Surtout quand ils font de la monoculture dans des bassins bétonnés, sous perfusion et nourrie aux pesticides.


Alors oui mais non. Avec son unité de lieu (Montfermeil comme décor à ciel ouvert), de temps (24h) et d'action (une bavure policière), Les misérables ressemble à une tragédie en 3 actes. On prend un réel plaisir à découvrir les rapport de force et les rouages officieux qui régissent cette...banlieue, cité, quartier populaire...à travers une galerie de personnages tous nuancés qui évite tout manichéisme.
On est pris par le mouvement d'une caméra toujours mobile qui induit une urgence et une tension permanentes de situations qui peuvent dégénérer à tout moment.


Sauf qu'il y l'acte 3, sidérant. Et il remet tout le film en cause. Attention, démonstration:


pendant tout le film, le réal s'attache surtout aux individualités des adultes, leurs postures, leurs magouilles. Leur comportement brutal s'explique dans un contexte de lutte pour un territoire. Les microbes, en arrière plan n'ont pas droit au même traitement. Eux aussi semblent dédaignés par le réal. Ils sont tout juste montrés comme des "petits cons" déjà contaminés par la violence de leurs aînés.


A la fin, ils finissent par se retourner contre les adultes dans une révolte organisée, une vengeance préméditée. Mais le réal les traite alors comme une masse d’encapuchonnés anonymes et unis. Il renonce alors à toute pédagogie de leur motivation personnelle et fantasme la rage destructrice d'une génération spontanée sortie de nul part.


On avait l'impression de comprendre un peu mieux la banlieue et voilà que le réal renverse la table en annonçant la violence accrue et aveugle de la génération d'après. La "banlieue" (re)devient un lieu de désordre hostile.


Et ça, c'est un bon gros message qui confortera ceux qui ont peur de la "banlieue" sans la connaître.
Bref, Les misérables est un film captivant qui décrit un réel beaucoup plus sérieusement que ce qu'on entend sur les plateaux TV mais qui finit fasciné par sa propre impuissance à réfléchir aux racines de la violence.

Dandure
5
Écrit par

Créée

le 21 nov. 2019

Critique lue 6.5K fois

Dandure

Écrit par

Critique lue 6.5K fois

23
1

D'autres avis sur Les Misérables

Les Misérables

Les Misérables

le 29 nov. 2019

Lâcheté et mensonges

Ce commentaire n'a pas pour ambition de juger des qualités cinématographiques du film de Ladj Ly, qui sont loin d'être négligeables : même si l'on peut tiquer devant un certain goût pour le...

Les Misérables

Les Misérables

le 21 nov. 2019

La haine c'était mieux avant

"Les misérables" est certes un constat d'urgence, un geste politique important qui mène à une conclusion pessimiste et sombre, beaucoup plus qu'il y a 25ans. OK. Mais je suis désolé, ce n'est pas du...

Les Misérables

Les Misérables

le 13 nov. 2019

La Haine

Ce n’est que le deuxième jour du Festival de Cannes 2019. Cependant, un souffle de fraîcheur surgit précocement. Les Misérables de Ladj Ly fait l’effet d’un immense coup de boutoir aussi rare que...

Du même critique

Les Misérables

Les Misérables

le 21 nov. 2019

L'élégie des fléaux

Attention, cet avis comporte ce genre de spoilers:

Antebellum

Antebellum

le 12 sept. 2020

Un titre en latin ne rend pas un film intelligent

Attention, ce spoiler comporte ce genre d'avis: s'il y a un sujet qui n'est pas abordé par Antebellum, c'est bien le racisme. Et j'ai rarement vu des "scares" faire aussi peu "jump". Ici, je raconte...

À couteaux tirés

À couteaux tirés

le 8 déc. 2019

A couteau tirés...mais à lame rétractable

Attention, cet avis comporte ce genre de :