Quand Scorsese y va de son petit thriller horrifique, il le fait jusqu’au bout, sans concession ni complexe, en prouvant qu’il est possible de générer de la tension et de créer de la belle image avec un script basique et des idées solides. Dans Cape of Fear, De Niro n’est ni plus ni moins que l’incarnation d’un Boogeyman excité, vestige oublié d’un passé qui refait surface au grand dam d’un petit avocat bien sous tout rapport. En 14 ans d’interprétations de textes philosophico-religieux, de rumination d’une sentence qui aurait du être plus légère, l’ex-taulard sort de sa cellule armé jusqu’aux dents, l’esprit énervé, les sens affutés, prêt à prendre sa revanche. De quoi faire sourire malicieusement le plus déviant des spectateurs, la main dans le popcorn, ravi d’assister au carnage à venir qui s’annonce sanglant.


Ce dernier, même s’il s’avère être plus psychologique que physique, tient toutes ses promesses, à savoir un bon petit paquet de dommages collatéraux, quelques tiers impliqués qui en prennent plein la tronche (De Niro en mode Zombie, ça fait son petit effet quand même) et un dernier acte complètement autre, entre exorcisme d’une âme vérolée et rédemption dans la douleur d’un père de famille qui prend conscience de l’importance de ses proches.


Scorsese s’amuse et soigne ses effets. Lorsque De Niro s’énerve, c'est-à-dire souvent, les corps saignent, et pas qu’un peu. L’acteur est au sommet de sa forme, physique d’athlète, charisme rageur, et sert son metteur en scène avec une fougue de chaque instant. Certains lui reprocheront un surjeu massif, mais la folie de son personnage s’y prête à merveille. Lyrique, véhément, l’homme met à mal ses cordes vocales et débite du sermon accrocheur avant d’appliquer sa sentence, le tout sous la houlette d’un Marty inspiré en diable qui laisse parler dans chaque séquence un sens de l’image à tomber.


On pourra lui reprocher de s’éterniser un peu trop par moment, lorsqu’il illustre notamment la vie de famille de son avocat en détresse, mais l’aplomb de ses séquences les plus réussies, qui ne sont pas forcément les plus énergiques, bien au contraire (le face à face entre la belle innocence et la bête stratège est un grand moment), l’excuse sans réserve et finit de faire de ces nerfs à vif un film mémorable à de nombreux égards.

oso
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le 22 juil. 2015

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oso

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