Véritable surprise que ce petit film sorti de nulle part, sorte de fusion improbable entre le cinéma de Catherine Breillat et d'un Xavier Dolan à maturité. Film théâtral qui oublie les prénoms pour n'appeler ses personnages que par leur représentation (leur caractère souvent : le couple, la gouvernante, l'étalon...) et par leurs façons d'interagir les uns sur les autres. Volontier verbeux, toujours ancré dans le ressenti, on évoque le passé (l'étalon fasciné par son membre, l'histoire du couple romancée par une intriguante pièce au registre antique), on flirte dans le présent, et au final, on se projette dans l'avenir. La partouze tarde, mais les tatonnements sont entamés dès le départ, fréquemment entrecoupés de pures séances d'onirisme qui, loin de brouiller les repères, offrent surtout de magnifiques visuels constamment tournés vers le fantasme. Les rencontres d'après minuit aborde différents visages du désir, il n'en brime aucun, même si celui de la Chienne est considérablement frustré au cours de l'aventure (sans être vraiment jeune, elle en a l'impatience, et une petite arrogance nécessaire à exciter ceux qui l'entourent). Mais le film a le bon goût d'entrecouper les diverses réflexions par de régulières pauses musicales (plus ou moins dynamiques, toujours envoûtantes grace à la contribution électrisante de M83). Film posé mais actif, il avance toujours dans l'expression des désirs, rompant régulièrement avec la logique et la cohérence pour mieux suivre les fantasmes. Il s'aventure même (un court instant) dans le registre fantastique avec un nouveau visiteur inattendu qui débouchera sur une conclusion inattendue, surement un peu étrange car délaissant le terrain du fantasme complètement (plus aucune dimension sexuelle), mais qui a le bon goût de garder un peu d'énergie pour faire décoller le spectateur une dernière fois avant le générique. Petite splendeur visuelle aimant disserter sur les attirances diverses de ses personnages (Eric Cantona surprend dans son rôle), les rencontres d'après minuit est le petit OFNI charmant qui surprend, donne un visage complètement intellectualisé du sexe (l'inverse d'un Noé, avec pourtant cette obsession du visuel) avec le bon goût nécessaire pour faire passer le mauvais (le caméo de Béatrice Dalle, ouch !). Electrisant.

Voracinéphile
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le 20 oct. 2015

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