A la fin des années 50, le cinéma populaire italien s'intéresse aux récits à l'antique, les scénaristes vont piller leurs sujets dans la mythologie grecque et l'Histoire romaine, après tout c'est leur Histoire, et Hercule va s'y tailler la part du lion, à peu près à égalité avec Maciste, le colosse intemporel découvert à l'époque du muet. Jusqu'au milieu des années 60, on verra des Apollons au torse luisant et aux muscles saillants sanglés dans leur pagne antique, des sirènes virginales et souvent très glamour drapées dans des tenues légères, des barbons incarnant de vieux rois tyranniques et des traitres au faciès adéquat revêtus de toges chatoyantes, dans un festival de décors baroques dont les infrastrutures infinies de Cinecitta offraient un riche écrin.
les Travaux d'Hercule est le film fondateur qui va déclencher la vogue du péplum en Italie. Steve Reeves, ex-Monsieur Univers et idole d'un certain Arnold Schwarzenegger qui dans sa petite chambre d'ado en Autriche, tapissait ses murs de ses posters, était un superbe athlète aux muscles impressionnants, mais aussi un acteur plutôt correct qui prêtait son physique de culturiste à ces aventures réjouissantes.
Contrairement à ce qu'on croit, ce film n'est pas le meilleur de la série, on n'y voyait pas les 12 Travaux, le titre français étant dû à une erreur des traducteurs ; il s'agit d'une sorte de digest où l'on a greffé sur le scénario l'histoire de Jason et de ses Argonautes (dont Hercule fit partie). En voyant ce film et quelques autres péplums à l'italienne, je me suis vite pris de passion pour cette imagerie séduisante et considérée aujourd'hui comme très kitsch, le ton était souvent naïf et bon enfant, mais j'aime cette imagerie pour tout ça, et je me suis aperçu que même s'ils étaient arrangés pour la narration cinématographique, les récits mythologiques et plus souvent l'Histoire romaine n'étaient pas si déformés que ça, il y avait toujours une base de vrai.
La production italienne de cinéma bis allait battre son plein grâce à ce premier film qui servit de mètre-étalon pour tous ceux à venir, imposant un certain nombre d'éléments qu'on retrouvera d'un film à l'autre. Souvent, la co-production avec la France et l'Espagne permettra un beau déploiement et des budgets corrects pour offrir des scènes de batailles dignes d'Hollywood, un casting souvent international avec un colosse américain dans le rôle du héros, des seconds rôles français et italiens (Serge Gainsbourg y sera souvent le prototype du perfide mielleux), des tournages en extérieurs en Grèce ou en Espagne (sans oublier de nombreuses séquences tournées dans les grottes des alentours de Rome), un travail sur la photographie souvent de qualité (ici, celle de Mario Bava, avant qu'il ne passe à la réalisation), de beaux costumes, et des réalisateurs rompus à cet exercice qui donneront souvent dans la mise en scène spectaculaire comme c'est le cas ici. Les femmes y seront toujours très belles, embellies par des toges diaphanes ou de courtes tuniques mettant en valeur leur féminité ; les blondes étant les héroïnes virginales, les brunes étant les traitresses connaissant une fin tragique (on a ici 2 beautés italiennes avec Sylva Koscina et Gianna Maria Canale).
Chaque film mettant en scène les exploits d'Hercule, ne manquera pas de magnifier les exercices de force du héros avec de savants gros plans sur le travail des muscles et lorsqu'il soulève des rochers en carton-pâte ou tord des barres de fer en caoutchouc, c'était un véritable rituel. Aujourd'hui, on peut trouver tout ceci amusant et s'en moquer, mais je suis encore sous le charme de ces films qui m'apportent une vraie détente.
La vogue du péplum sera détrônée vers 1965-66 par l'arrivée du western ; en attendant, ce film malgré ses imperfections, obtiendra un tel succès, que la même équipe se reforme l'année suivante pour tourner Hercule et la reine de Lydie, qui en est la suite directe avec toujours Steve Reeves dans le rôle du fils de Zeus, et la superbe photo de Mario Bava.

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le 3 janv. 2020

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Ugly

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