Que voici une jolie surprise sortie tout droit de ma médiathèque préférée. Un petit film d' « épouvante » français des années 60. J'étais intriguée je dois dire.
L'histoire se révèle être un conte cruel et touchant, appuyant sur des thèmes forts bien que maintes fois utilisés au cinéma, telle la captivité d'un être cher, le meurtre commis par amour ou encore le désir du scientifique de se prendre pour Dieu.

Le film s'ouvre sur une musique entêtante de Maurice Jarre, qui ressemble un peu à une mélodie de fête foraine, donc peu appropriée pour ce genre de film à première vue. Cependant, le thème principal revenant à plusieurs reprises dans l'œuvre, on se rend compte, au contraire qu'il lui colle parfaitement, telle une ritournelle mélancolique et pathétique.
L'atmosphère est étrange et personnellement, je n'ai pu m'empêcher d'imaginer le film tourné de nos jours par des américains ou des asiatiques. Alors certes ça ferait sans doute beaucoup plus peur, et le gore s'en donnerait à cœur joie, mais je pense sincèrement que cette poésie indéchiffrable qui s'insinue dans le film serait occultée.
Il y a en ce personnage de la jeune fille masquée, la figure de l'innocence et de la liberté. Elle contraste totalement par la neutralité de ses expressions avec le personnage du père, joué par Pierre Brasseur, qui semble suivre un scénario tout tracé, persuadé de faire le bon choix alors qu'il se transforme en monstre tout au long du film. Elle (notamment par des choix de costumes parfaits) évolue comme un fantôme dans les pièces de ce manoir immense. Fantôme d'une vie perdue, d'un physique à tout jamais oublié au fond d'un miroir.
Bien entendu, cela rappelle la créature de Frankenstein, avec le créateur qui devient monstre, et sa créature qui s'humanise. Ici, nous ne connaissons rien de la personnalité de la jeune fille avant son accident mais on peut aisément penser que sa situation l'a fait évoluer et prendre conscience des atrocités perpétrées par son père. Quant au personnage de l'assistante, il très bien écrit, indispensable et vraiment attachant.
Sur le plan formel , j'émettrai un bémol au niveau de la lumière. En effet, bien que maîtrisée dans les scènes d'intérieur, quelques utilisations malhabiles viennent entacher les scènes d'extérieur. Ainsi à deux ou trois reprises, une scène semblait être tournée la nuit dans un plan alors que le plan suivant, une impression de milieu d'après-midi était rendue ! Ce fut parfois déstabilisant.

Je pense que la fin pèse beaucoup sur ma note car elle possède un sens profond qui vient renforcer l'impression d'assister au récit d'un conte ou d'une fable à la Andersen. C'est très dur mais en même temps, impossible de nier que ce plan final est d'une grande beauté.

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le 11 avr. 2012

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Before-Sunrise

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