Pour son retour des deux côtés de la caméra depuis son oscarisé Argo, Ben Affleck signe une nouvelle adaptation de Dennis Lehane (comme son premier film Gone Baby Gone ) Live by night film de gangsters se déroulant durant la prohibition. Doté d’un solide casting et du prestigieux directeur de la photographie Robert Richardson, Ben Affleck signe-t-il une nouvelle réussite ?


Quand il revient désabusé des champs de bataille européens de la première guerre mondiale Joe Coughlin (Ben Affleck) décide de devenir un hors la loi, braquant des banques avec quelques complices. Il refuse de prendre parti dans la guerre des gangs qui oppose à Boston en pleine prohibition l’italien Maso Pescatore (Remo Girone) à l’irlandais Albert White (Robert Glenister) mais sa relation avec la maîtresse de ce dernier Emma Gould (Sienna Miller) va le contraindre à travailler pour Pescatore qui l’envoie en Floride pour sécuriser l’approvisionnement de ses établissements en alcool…


Avec ce quatrième film comme réalisateur, le deuxième après Gone Baby Gone tiré d’une œuvre de Dennis Lehane (Shutter Island) dont il écrit aussi l’adaptation , Affleck signe une lettre d’amour aux films de gangsters des années quarante dont il convoque toutes les figures (les mauvaises langues diront les clichés) : la narration en voix-off « hardboiled » («J’ai vécu cette vie pendant dix ans, jusqu’ à ce qu’elle me rattrape.«) les Borsalinos, les mafiosi en costumes trois-pièces , le héros rattrapé par son passé, les règlements de compte sanglants et leurs lots de trahisons.


L’action démarre à Boston la ville fétiche du réalisateur mais se délocalise vers le soleil de Floride qui offre un environnement original pour un film de gangster d’époque. La direction artistique est fastueuse mais Affleck et son prestigieux directeur de la photographie Robert Richardson (JFK, Casino, Shutter Island, Les huit salopards) évitent le coté compassé du film d’époque et abolissent la distance en conférant un aspect contemporain aux roaring twenties. La photographie naturaliste de Richardson est superbe même si il s’abandonne parfois à quelques images de carte postale. Live by Night souligne les deux points forts de Ben Affleck réalisateur : un œil sur pour l’action et un vrai talent de directeur d’acteurs.


Il met ainsi en scène deux séquences d’action intenses très réussies : un braquage se terminant en une poursuite automobile aussi efficace que celle de The Town (mais avec des Ford-T) et un gunfight final parfaitement chorégraphiée. Affleck met en valeur une galerie de second rôles tous interprétés par d’excellents acteurs Chris Messina est très bon en sidekick d’Affleck , Brendan Gleeson sobre en figure paternelle stoïque mais aimante, une Elle Fanning dont l’arche dramatique est la plus touchante et Chris Cooper, déchirant dans le rôle du père de cette dernière, policier vertueux que le chagrin va briser. Il déniche des gueules comme Matthew Maher abject en membre du KKK , Remo Girone en mafieux italien et Robert Glenister dont le physique évoque Donald Trump (ce qui donne au film avec la présence du Ku Klux Klan un aspect particulièrement actuel).


Live by Night n’est pas exempt de défauts et de maladresses ainsi , si la densité des intrigues imprime au film un rythme feuilletonnant très plaisant (les deux heures du métrage filent) elle oblige Affleck à survoler beaucoup de thèmes qui auraient mérité plus d’espace pour se développer (les relations entre les communautés et les classes sociales ,l’influence de la religion, les liens entre Cuba et les USA). Ce survol se fait au dépens de certains personnages comme celui de Zoé Saldana dont l’entente romantique avec Affleck fonctionne mais qui a peu de matière à jouer. Le romantisme du film est parfois un peu naïf mais toujours sincère.
Ben Affleck acteur, mâchoire carrée et stature de colosse (le tournage de Batman v Superman était concomitant à celui du film) est omniprésent. Bien que sa performance solide ancre l’ensemble, il est parfois un peu court émotionnellement. La mélancolie de son personnage et son jeu « en dedans » le placent parfois en retrait, observateur détaché de sa propre vie. Il apporte malgré tout une aura indéniable de star à l’ancienne qui colle bien au film.


Conclusion : Lettre d’amour aux films des années 40, fresque de gangsters romantique et violente sous le soleil de Floride parfois maladroite mais toujours classe Live by night s’il n’atteint pas l’efficacité de The Town ou la densité émotionnelle de Gone Baby Gone confirme la place d’Affleck parmi les réalisateurs sur lesquel il faut compter.

PatriceSteibel
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le 8 janv. 2017

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