Tout ça pour une Playstation !

Le Found Footage reprend du poil de la bête grâce aux plateformes de SVOD, il y a évidemment à boire et à manger, et parmi le tout venant de la production principalement squattés par les fantômes et maisons hantés, en voilà un qui sort un peu du lot pour s’inscrire dans l’Amérique Trumpiste avec un sujet qui fera écho aux nombreuses fusillades de Columbine à Waco, jusqu’aux plus récentes. Un sujet forcément tabou outre atlantique et presque plus effrayant que n’importe quel revenant, ce qui ne devrait pas manquer de relancer l’éternel débat sur le deuxième amendement. On y suit une mère célibataire totalement désemparé face à la crise d’adolescence de son fils qu’elle soupçonne d’être un dangereux psychopathe. Pour prouver ses dires, Abbey a donc décidé de l’espionner et de tout documenter dans un fichier nommé M.O.M. dans lequel nous irons nicher les vidéos pour reconstituer le fil des événements qui ne suivent pas forcément un ordre chronologique pré-établi, et ce afin de pouvoir nous faire notre propre opinion sur le sujet. Et hormis un plan de caméra de sécurité chipé dans une armurerie sans que l’on comprenne vraiment comment la mère a bien pu l’obtenir, rien ne viendra heurter la diégèse de ce long-métrage dont le dispositif a finalement moins d’intérêt que le fond de son sujet. Celui-ci devrait donc facilement parler aux parents et aux adolescents sur ce qui peut bien se tramer dans la tête d’un proche, puisque l’on ne connaît jamais vraiment les gens avec lesquelles on vit. Chaque spectateur sera libre de projeter sa propre expérience, je l’ai moi-même fait, et pour cause puisque ma mère fût convoqué à l’époque du lycée parce que la psy de l’époque trouvait que j’avais le profil d’un tueur de masse. Elle n’étais pas loin de la vérité, mais heureusement elle n’est plus là pour en témoigner… Mouahahahah.

Bailey Edwards livre une interprétation remarquable dans la peau de cet adolescent solitaire et tourmenté, genre élève à problèmes renvoyés de plusieurs écoles, qui rigolent de la mort et tout ce qui l’englobe en mimant son suicide ou bien en faisant semblant de tuer des gens, comme s’il avait parfaitement compris l’absurdité de la vie et des rapports sociaux ainsi que leur hypocrisie. L’ado exprime toute sa rancoeur dans les institutions, et sa noirceur au quotidien avec des gestes très souvent anodins mais qui pourraient tout aussi bien avoir de dramatiques conséquences comme ce pavé lancé sur une route qui aura peut-être voir même sûrement provoqué un accident hors champs, ce qu’il qualifiera lui même de « sélection naturelle ». Le personnage montre souvent très peu d’empathie pour son entourage et ce depuis son plus jeune âge. Evidemment, il incarne le prototype absolu du tueur  : Il est méticuleux, manipulateur, vicieux, impulsif et psychotique, il aime regarder des films violent, joue à des jeux vidéos. Il est politiquement tourné vers l’extrême droite et possède de l’équipement militaire notamment un masque à gaz affublé d’une croix gammée ainsi qu’une arme qu’il a trafiqué de manière à tirer de vrai balles, et il écoute très probablement du métal. On pensera pouvoir facilement cerner le personnage, mais en réalité, celui-ci s’avère plus profond comme le révéleront certains extraits vidéos, moins pire, ou du moins plus nuancé que nous le pensions au premier abord.

Mais il convient également d’analyser l’attitude de sa mère, alcoolique, parano et pas forcément moins lunatique. Elle semble projeter ses propres angoisses et expériences traumatiques de jeunesse sur son fils au point de précipiter le rêve prémonitoire qu’elle redoute tellement. Les chiens ne font pas des chats, et il paraît évident que son influence aura beaucoup jouer dans la construction de la personnalité de Jacob, même si le grain de folie peut parfois s’avérer héréditaire. Après tout, nous ne sommes souvent que le reflet de nos parents à quelques différences près, hélas ou heureusement. Le changement de comportement et le caractère rebelle peuvent donc être légitimement associé à une crise d’adolescence compliqué, ce que l’on appelle communément l’âge bête où l’individu est alors en pleine mutation. Mais on retiendra que cette prise de position ne viendra pas seulement de la confiscation de sa console de jeux ; on a tous connu cette punition après un mauvais bulletin ; mais bien de la violation de son intimité, ce qui constitue avec ces vidéos retrouvés une trahison absolue, évidemment de là à séquestrer et torturer ses parents dans un placard des jours durant, il n’y a qu’une porte que je ne verrouillerai pas et vous non plus je présume. L’expérience se limite néanmoins à cela avant un ultime règlement de compte sanglant qui n’apporte finalement pas grand-chose et ce qui ne fera certainement pas avancer le schmilblick dans les rapports psychiatriques d’autant plus que l’intérêt du film finira lui aussi par s’estomper et ne devrait pas longtemps subsister après le premier visionnage un peu trop inoffensif. Moralité de la leçon, pour éviter que vos enfants deviennent des monstres, laissez-les jouer librement à la Playstation !