La voici. La dernière œuvre de Steven Soderbergh. Celle qui conclut une brillante carrière cinématographique avec une Palme d'Or en guise de récompense pour son premier film. Ma Vie avec Liberace est une sorte de petit miracle, un film qui n'aurait pu jamais voir le jour si la chaîne HBO n'avait pas décidé de le produire et le diffuser sur les télévisions américaines. Jugé « trop gay », il sort malgré tout sur nos écrans pour notre plus grand plaisir. Celui de voir un acteur ressuscité dans un rôle de génie : un pianiste prodige qui, à la fin de sa vie, va rencontrer l'un de ses plus grands amour, Scotty.

Pour narrer l'extravagante existence de cet artiste, il fallait avoir une approche originale et innovante, ce que le cinéaste a parfaitement compris. Cette biographie n'est pas mono focale mais vue d'un autre œil, celui de Scotty, qui rend le personnage de Liberace plus intéressant. Sans rentrer en empathie avec lui, nous pouvons sonder la tristesse qui s'est accumulée en lui depuis tant d'années malgré sa popularité. Ses relations affectives se finissant tout le temps par des échecs, on espère que sa rencontre avec ce jeune homme changera la donne. Un vrai rapport de force s'installe entre eux, car c'est leur relation ambiguë qui passionne (amant, père, mentor) plus que le génie musical de Liberace. Nous le voyons sous le cercle intime afin de mieux percer ses secrets et sa personnalité cachée.

Une nouvelle fois directeur de la photographie, Soderbergh nous livre des images très douces et superbement éclairées. Elles renvoient parfaitement au monde artificiel dans lequel vit le pianiste. Idem pour une mise en scène épurée qui arrive tout en légèreté à suivre des protagonistes souvent mobiles. On apprécie toujours autant ces contre-plongées radicales arrivant à capter un certain degré de folie (on repense au récent Effets Secondaires), notamment vers la fin du film.

La réussite de cette œuvre vient de deux grandes interprétations qui confortent le statut de l'un (Damon), et rassurent sur la santé de l'autre (Douglas). Tout deux n'ont pas besoin de parler pour montrer leur sensibilité, et il suffit d'un regard pour percer toute leur émotivité. À eux deux, ils forment un couple ultra-réaliste et profondément sincère. Car s'ils n'ont pas la même vie que les autres, ils ont cependant des problèmes similaires, tels que la jalousie ou cette lassitude liée au quotidien.

Le septième art nous a toujours surpris, sous toutes ces formes. Alors nous pouvons croire à un possible retour du cinéaste, un artiste qui aura marqué le cinéma américain pour ses films dont la notoriété n'a d'égale que la qualité. Merci pour cette belle aventure Steven, et peut-être à bientôt. Qui sait ?
Hugo_Harnois_Kr
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le 10 févr. 2014

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Hugo Harnois

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