Jocelyn Quivrin était un jeune acteur talentueux qui a malheureusement été tué au cours d’un accident de la route en 2009. Sa courte carrière cinématographique a été marqué par plusieurs rôles sympathiques, notamment dans les films 99 francs, LOL ou encore Incognito, mais surtout par un projet inachevé : très marqué par sa rencontre avec le réalisateur Eric Rohmer, il a voulu en faire un film et a écrit un scénario en compagnie de Léa Fazer. Après la mort de Jocelyn Quivrin, cette dernière a décidé d’aller au bout du projet, et c’est ainsi qu’est né « Maestro », sorti en 2014.


Henri est un jeune homme naïf, qui galère entre deux tournages de publicités et qui a du mal à arrondir ses fins de mois. Sa meilleure amie, Pauline, également actrice, obtient un rôle dans le film du célèbre réalisateur de film d’auteur Cédric Rovère, et parvient à trouver une place pour Henri dans le casting. Ce dernier, accompagné de son meilleur ami et « agent » Nico, et très heureux d’avoir enfin un vrai rôle de comédien, s’attend à un tournage extraordinaire, mais va vite découvrir la réalité de l’industrie du cinéma, et la vision de Cédric Rovère, avec qui une certaine complicité va naitre et évoluer…


Dans la vie, et en particulier dans le monde du cinéma, on fait tous des rencontres extraordinaires, qui nous marquent pour une raison ou pour une autre. Ces rencontres peuvent être amicales, amoureuses, elles peuvent évoluer… Pour Jocelyn Quivrin, sa rencontre avec Eric Rohmer a changé sa vie, sur de très nombreux aspects. Et cela entraine un film touchant, dans lequel les personnages de Henri et Cédric font écho à la réalité.


Henri, interprété avec tendresse par Pio Marmaï, est un jeune homme en galère, timide, maladroit, mais drôle et plein de vie. A côté, Cédric, campé par le merveilleux et regretté Michael Lonsdale, est une vieil homme en fin de vie, qui galère à financer ses films, dans une époque qui n’est plus la sienne. La complicité entre les deux personnages – et l’alchimie entre les deux acteurs, tous les deux parfaits – saute tout de suite aux yeux. Henri découvre la littérature, la poésie, la lecture, la nature, et Cédric voit en lui un certain talent. Henri, quant à lui, n’hésite pas à embêter Cédric, lui faire des blagues, pour le détendre.
Les autres personnages sont également joués avec intelligence par les différents acteurs (Alice Belaïdi, Déborah François, Nicolas Bridet notamment).
D’un point de vue purement cinématographique, le film est honnête, avec une jolie composition originale, de beaux décors et de beaux costumes (le tournage montré dans le film étant un film d’auteur et d’époque), et une photographie très correcte.


Au-delà de la tendresse de cette relation naissante et évolutive entre Henri et Cédric, le film n’hésite pas à se montrer plus léger à certains moments, avec beaucoup de répliques ou de scènes assez drôle. Par exemple, Henri et Nico qui décident de jouer au ping-pong après s’être scotché à des chaises, dont l’une va se casser, ce qui aura certaines conséquences pour la suite. Henri aime se moquer de Cédric sur certaines choses, notamment ses gouts alimentaires ou en matière de vent. Ou encore lorsque l’un des techniciens du film raconte qu’il a refusé de participer au tournage d’un film pas très connu, avec un « scénario très étrange sur un aventurier dans la jungle avec une sacoche », ce qui est évidemment faux.


L’écriture de Léa Fazer, complétant celle de Jocelyn Quivrin, et sa réalisation sont sobres, mais efficace. Cela offre un petit feel-good movie émouvant, mais plein de bons sentiments, et qui montre l’importance de l’amitié, des rencontres, du hasard. « Jouissez de la vie, il est beaucoup plus tard que vous ne le pensez » affirme Cédric à son ami Henri, et il a bien raison. La vie est quelque chose de magique. L’amitié, surtout.

HugoDe_Ranter
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le 21 sept. 2021

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