Mais, vous vous dites, en liant le synopsis ci-dessus ? Mais qu’est-ce que c’est que ça ?
Tout d’abord pour les non-hispanisants, je précise le jeu de mots malheureusement intraduisible :
« Mamar » c’est le verbe « sucer »au sens sexuel du terme. Mixé ici avec Tarentule.
C’est bien de ça qu’il s’agit, puisque le moustachu un peu Bear avale ses victimes en leur injectant une quantité invraisemblable de venin d’araignée qui fait fonde tout l’intérieur du corps en les suçant, avant de tout ingérer par le même acte, ne laissant que la peau et quelques résidus.
C’est un des deux films présentés au festival Chéries Chéris de l’an dernier avec interdiction aux moins de 18 ans !
Une sorte de « Under the skin » (Jonathan Glaser, 2013) mais en version gay débile revisité façon « Killer Kondom », le film que ( Martin Waltz ) a adapté d’une géniale BD de Ralf Konig en 1996, ou un préservatif possédé dévore bites et couilles.
C’est une proposition intéressante et transgressive qui est à la recherche des marges du récit. Une expérience qui s'affranchit des contraintes narratives habituelles, optant pour une approche visuelle et sensorielle qui privilégie les textures, les couleurs et les surfaces à une narration linéaire, créant une esthétique onirique.
On tourne autour du gore une certaine élégance sans jamais y plonger.
L’esthétique du film semble crier un « T’as qu’à en faire autant ! » venue du recoin le plus kitsch de l'univers queer avec des ees échos de Bruce LaBruce transparaissent dans la façon dont le film embrasse l'explicite et la provocation, notamment dans les gros plans de pénis qui ponctuent les scènes mais en mode Giallo.
Ce cinéma n'est pas pour tout le monde. C'est un cinéma pour ceux qui veulent regarder là où la caméra ne s’aventure généralement pas.
De Sosa ne recherche ni la justesse, ni le prestige, ni le confort du spectateur. Il aspire simplement à ce que peu d'autres recherchent : faire ce qu'il veut, à sa manière. Sa création est un mélange abâtardi de giallo, de softcore, d'actualité trash et de science-fiction bon marché. Une ode au visqueux, au mutant, au camp. Un cinéma de guérilla formel avec l'âme d'une bande dessinée expérimentale. Le scénario ? Hors sujet. Les effets ? Une merveille de carton-pâte. Ce qui compte ici, c'est la puissance du geste : Mamántula dit « oui » au plaisir, à l'étrangeté, à l'impureté, à l'effondrement des genres et au sexe comme image politique.
Tout cela est probablement bien symbolique : du SIDA déjà, et il est clair que le film manque de subtilité dans ses allégories (certains pourraient interpréter cette « menace araignée » comme l’arrivée l'extrême droite ou quelque chose du genre), mais ce manque de subtilité (politique) homogénéise le groupe qu'il tente de défendre. D'emblée, deux policières, aux échanges ridiculement discursifs (mais qui, curieusement, réussissent une scène romantique avec une habileté impressionnante), sont les seules à prétendre défendre ce groupe persécuté, tandis que les policiers (hommes) le stigmatisent en faisant des descentes dans les bars de drague.
Ce n’est pas subtil, mais suffisamment magnétique pour ne pas regarder sa montre...
On peut trouver tout ça grotesque. Oui, mais d'un grotesque sublimé !