Coppola livre avec Megalopolis le film de toute une vie, qu'il a conçu et autofinance seul. Et qui risque de lui coûter très cher puisque le film tel qu'il est conçu, écrit, filmé, ne peut décidément pas s'adresser à un large public (auquel il est pourtant destiné dans son message ! Paradoxe).
De quoi parle Megalopolis ? C'est compliqué. A travers la ville futuriste de New Rome ( qui singe la ville de New York avec des relents d'antiquité romaine) Coppola décrit dans la première heure de son film un empire décadent se vautrant dans l'hubris, ou pullule le sexe, la drogue, l'indécence des ultra riches, la misère des bas fonds.
Derrière cette toile de fond, Coppola décrit la lutte entre deux hommes, César architecte humaniste qui veut changer la ville avec un nouveau composant revolutionnaire, et le maire Ciceron, conservateur au service des élites financières.
Une sorte de triangle amoureux s'installe entre César et Julia ( la fille jet setteuse de Ciceron) et Wow Platinum, maîtresse déchue de César. Parallèlement Claudio le cousin libidineux de César complote contre lui par jalousie ( et pour prendre la fortune de son père le grand ponte de la ville).
La narration de cette décadence est tantôt futuriste, avec une esthétique léchée, tantôt nanardesque, avec certains passages qui frôlent le ridicule. Pour autant, je n'ai pas trouvé que ça enlevait au message, à la vision de Coppola sur l'Amérique ( et la civilisation humaine).
Une vision très pessimiste avec une nuance d'espoir, incarnée ici par César l'artiste visionnaire pouvant "arrêter" le temps. La dernière demie heure du film est beaucoup trop longue. Trop d'effets stylistiques pour ne pas dire grand chose, l'abus de l'hypersexualisation de WoW Platinum, un personnage Claudio transformé en pseudo-trump... Tout se mélange, se succède et finalement pour un film qui parle du temps qui passe, on regarde sa montre souvent.
Néanmoins le film connaît un sursaut dans sa fin, un discours de César/Francis pour vanter les merites perdus de l'espèce humaine, qu'il ne tient qu'à elle de retrouver à travers sa proposition de ville nouvelle ( utopie fragile et possible salut ou damnation des citoyens) de la ville de Megalopolis.
Le film se termine sur un plan intéressant qui traduit bien le message du film, qui aurait gagné à être condensé et exposé plus rapidement qu'en 2h18.
Néanmoins j'aime plutôt ce film. J'ai aimé la proposition de Coppola de cette œuvre d'art qu'il livre au public, quitte à y perdre sa fortune.
Megalopolis c'est un film futuriste, philosophique, réactionnaire dans sa premiere heure et en même temps humaniste dans sa conclusion. Décidément inclassable, a défaut d'être incassable face à la critique populaire. Alea jacta est.