De rien la mort !

Plus le temps avance, plus je commence à comprendre que Bertrand Blier est mon réalisateur préféré. Le meilleur scénariste que nous puissions avoir et un réalisateur avec ses codes et ses gimmicks de mise en scène. Et "Merci la vie" n'échappe pas à la règle.

On retrouve tout ce que j'aime dans les dialogues, ces échanges entre des acteurs de génie, des rôles parfaitement taillés pour ces derniers, on est face à un Blier très inspiré qui prouvent encore une fois son amour pour la comédie et le beau jeu

Visuellement aussi, c'est le Blier fin 80, début 90, donc la réal est bien plus importante qu'avant, faisant place à des travellings virtuoses, des plans qui laissent place au décor (Ce qui n'était jamais le cas dans ses premiers films, toujours concentré sur les personnages et rien d'autres), encore une fois qui montrent tout l'amour qu'il a pour le cinéma.

Mais alors, pourquoi une note si basse ? Pourquoi ce 4 si tout est réuni ? Je vais éclaircir ce mystère car dans les deux points, il y'a des défauts, des énormes défauts, qui ne rendent pas l'oeuvre plus belle par son manque de perfection, mais plus quelconque, une parodie de Bertrand Blier

La première chose qui frappe, l'alchimie Gringberg-Gainsbourg est inexistante alors qu'elle me paraissait évidente sur le papier. Elles peinent à m'émouvoir, me choquer ou me faire rire, quand elles ont des moments de complicité. Je ne remettrais jamais en cause le talent des deux (Surtout Charlotte qui est peut être mon actrice préféré), mais quand on compare à Dewaere-Depardieu, Dupontel-Dujardin, Depardieu-Balasko, Depardieu-Blanc (Beaucoup de Depardieu), le choc est brutal. D'ailleurs, certains acteurs cités comme Blanc et Depardieu se content de second rôle dans "Merci La vie" et sauvent tout tellement ils sont parfait. Premier film de Blier avec un Duo féminin, le dernier pour l'instant.

Parlons maintenant de ce qui me gêne dans l'esthétique et la réalisation
Comme dit précédemment, le Blier de cette époque connait plus sa caméra. On a pu le voir dans l'excellent "Trop belle pour toi" à la mise en scène très élégante et "Merci la vie" est dans le même registre, mais ne marche pas, pourquoi ? Dans "Trop belle pour toi" la classe des personnages, l'environnement social, l'importance de Schubert rendait la sophistication de la mise en scène pertinente. Mais dans une histoire, avec des environnements urbains, du Blier classique, un retour aux sources vers "Les valseuses", le visuel attrayant perd de sa force et de son intérêt, comme si Blier avait trahi ce qu'il était au départ et m'avait trahi par la même occasion. Même dans côté débrouillard qui disparait, sûrement causé par les budgets qu'on alloue à ses productions, on peut voir ça aussi dans les effets spéciaux présents. Même dans le choix des musiques, totalement en raccord avec l'univers 80-90 du cinéaste, à coup de bons gros synthés, mais prendre Philip Glass pour prendre Philip Glass, c'est pas de l'ambition pour moi, juste de la coquetterie.

C'est un film que je prendrais sûrement plaisir à re-découvrir dans pas mal d'années mais j'avoue que le choc a été très violent et que je ne peux pas l'apprécier maintenant. En découvrant d'autres facettes de sa filmographie, je réussirais à le situer, j'ai fait un saut dans le temps trop violent, les années 90 ont tout d'une période particulière de sa carrière.