Superbes images, terribles dialogues.
Pourquoi les Américains restent-ils toujours si Américains quand un de leur film montre un des leurs plongé dans la réalité d'un pays étranger ? Je pense à des films sympathiques mais ratés comme "Rangoon", "La cité de la joie", etc...
Tout le monde connaît l'histoire : la descente aux enfers de William Hayes, jeune idiot pris à la douane turque avec 2 kg de hash sur lui, et qui en prend pour 4 ans dans la prison d'Istanbul, une sorte de cour des miracles tenue par un gardien minéral et passif, Hamidou, et où sévit le turc Rifki, un intermédiaire veule. Son père se déplace, mais le procès devient un enjeu diplomatique entre Nixon et Ankara, aussi après être arrivé à 56 jours de sa libération, William en reprend-il pour 30 ans. ça le détruit et ça le pousse à chercher à prendre le "midnight express", c'est-à-dire tenter de s'échapper, avec l'aide de Max (John Hurt, encore dans un rôle à la McCartney destroy) et de Jimmy (Randy Quaid). Ils tentent les égoûts, mais leur stratagème est découvert. Après qur Rifki ait fait accuser et torturer Max pour détention de hash, William tente de le tuer et se retrouve à la section 13, celle des aliénés. Il devient une loque, jusqu'à ce que son ancienne petite amie vienne le voir. Il parvient sur un coup de chance à tuer Hamidou, prend son uniforme et sort.
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Commençons par l'image et le montage, qui sont un véritable régal. Alan Parker a magnifiquement capturé la lumière d'Istanbul, dorée comme du milel, et bien qu'il s'agisse d'un film de prison tourné en majorité à Malte, "Midnight express" est pour l'instant un des films qui à mes yeux a le mieux capturé l'atmosphère de cette ville, dans les quelques séquences de rue qu'on en voit. De même, l'omniprésence du turc non sous-titré est importante et fait beaucoup pour l'atmosphère du film. La photographie est sublime : marrant comme les scènes de poursuite dans Constantinople avec la musique stressante m'ont fait penser à "Blade Runner" de Ridley Scott... Le montage repose aussi beaucoup sur les bruitages, avec ces bruits oppressants de respiration et de battement de coeur dans les séquences du début et de la fin, et ces bruits ambiants de conversation en turc, de musique orientale, etc....
En revanche, le film est trop dramatisé pour être vraisemblable, et les dialogues d'Oliver Stone, en particulier, sont assez faibles. La scène avec le père, qui parle de la bouffe turque dégueu pour cacher son émotion, ou confie à son fils un paquet et, de rage, donne un grand coup dedans, donne l'impression d'avoir affaire à deux Américains pur jus, un peu débiles sur les bords. Surtout, le personnage ne semble jamais reconnaître qu'il a fait une grave erreur. Ou alors c'est moi, enfant de l'époque post-11 septembre et de la tolérance zéro, qui pense au départ qu'il n'a eu que ce qu'il méritait ?. Le film décrit de bout en bout William comme une victime, mais il aurait gagné à le rendre moins sympathique. Il est à son meilleur quand il oublie un peu son personnage pour se concentrer sur la prison. Ses murs vérolés et poussiéreux. Ses robinets rouillés. Ses gardiens armés de gourdins. Ses paons. Le carré de ciel au-dessus de la cour. La rampe vers les toits.
On a retenu ce film pour sa violence, qui rappelle un peu celle de Scorsese. Elle intervient avec des plans serrés, assortis de bruitages qui mettent mal à l'aise, mais surtout dans la dernière partie, avec la déchéance physique et morale du personnage, devenue une véritable loque humaine.
Donc oui, "Midnight express" est un film-choc, mais ce n'est pas pour autant le chef d'oeuvre dont on nous parle. Ses images sont superbes, son ambiance réussie, mais à y regarder de près, le contenu n'est pas très très reluisant.