Your mission, should you choose to accept it...

La saga Mission : Impossible est probablement l'une des sagas de films d'action les plus sous-estimées qui soient. On la compare parfois aux films James Bond, pourtant ce sixième opus sur Ethan Hunt passerait presque inaperçu tant on en parle peu. La promotion autour de ce film n'a pas été tellement poussée. Alors que chaque film sur l'agent 007 est presque un événement mondial tant l'espion britannique est culte. Si les films sur James Bond étaient franchement meilleurs que ceux sur Hunt, on comprendrait qu'on en parle plus et que la franchise Mission : Impossible passe au second plan. Mais ce n'est pas le cas.

Pour tout dire, la saga avec Tom Cruise est bien plus ambitieuse. Et cette ambition est au cœur de la saga depuis le tout premier opus. Le film de Brian de Palma essayait déjà à son époque de proposer des séquences d'action et d'espionnage inédits auparavant. Ce qui lui a valut son succès d'ailleurs. Et cette ambition est restée, chaque nouveau réalisateur apportant son style et tentant d'amener encore plus loin l'action et le suspens.
Pour cela, l'équipe de Tom Cruise n'hésite pas à poser ses bagages n'importe où dans le globe pour mener à bien des missions toujours plus impossibles, quitte à devoir véritablement escalader la plus haute tour du monde (Mission Impossible : Ghost Protocol), ou s'accrocher à un avion en plein décollage (Mission Impossible : Rogue Nation). Et évidemment, chacune des cascades est vraiment réalisée (très peu d'effets numériques ici), avec l'ami Cruise qui assure toutes les siennes lui-même, quitte à se blesser. La saga a toujours cherché à être le plus spectaculaire possible tout en étant très réaliste. Cela se voit et ça apporte un vrai plus à chaque épisode, comparé à n'importe quels autres films d'action.

Jusqu'ici, chaque opus avait été réalisé par un cinéaste différent. Cependant, pour Mission Impossible : Fallout, Christopher McQuarrie revient derrière la caméra après avoir dirigé le précédent volet. Il y en est également le scénariste, poste qu'il tient dans la franchise depuis l'épisode numéro 4. On aurait pu regretter que McQuarrie revienne en tant que réalisateur, malgré l'excellent Rogue Nation, car la saga était justement caractérisée par un changement de style à chaque nouvel opus du fait du changement de réalisateur. Mais on ne va certainement pas reprocher à l'équipe du film d'avoir dérogé à la règle cette fois-ci, tant ce sixième film est excellent.

Rarement dans des films d'action, même les plus récents, on aura vu des séquences aussi nerveuses et intenses. Les bouffées d'adrénaline sont constantes dans ce long-métrage. Même si on se doute que l'équipe d'Ethan Hunt réussira sa mission, le film parvient tout de même à instaurer beaucoup de suspens quant au succès de la mission. Les fois où les protagonistes passent à deux doigts d'échouer sont nombreuses et c'est vraiment de justesse que les erreurs sont évitées. Et ça, McQuarrie le rend extrêmement bien dans sa réalisation. Ce n'est parfois que par des détails, la moto de Hunt qui va frôler une voiture en sens inverse par exemple, mais le spectateur va à chaque fois retenir son souffle tellement c'est passé prêt de l'accident. Il y a donc une véritable tension tout au long du film, cette peur que les héros soient trop courts, qu'ils n'y arrivent pas. Cela renforce incroyablement l'intensité des scènes d'action. Cette tension, qui est malheureusement beaucoup trop souvent absente dans les films d'action actuels, est ici à des sommets et ne relâche le spectateur qu'à la toute dernière minute.

Parmi les scènes d'action de ce sixième opus, on ne trouve pas vraiment LA scène marquante. Celle qui donnera tout le côté impossible au film. Dans le 3, c'était l'infiltration du Vatican. Dans Ghost Protocol, c'était l'escalade du Burj Khalifa. Dans Rogue Nation, c'était la scène sous-marine dans la turbine. Dans ce Fallout, on ne peut pas vraiment dire qu'il y en a une qui se démarque, notamment parce qu'en fait chacune des parties du film est d'une force monstrueuse et par conséquente aucune ne prend le pas sur l'autre. Toute la séquence à Paris est exceptionnelle, avec un combat dans les toilettes d'une grande brutalité (si seulement toutes les scènes de combat à mains nues pouvaient ressembler à celle-là) puis une couse poursuite en pleine capitale absolument folle (encore plus quand on connait l'état du trafic et la circulation dans cette ville), autant en voiture qu'en moto et avec un très bon usage des décors qu'offre notre capitale. Et il y a évidemment le final dantesque où on trouve de tout (course poursuite, combat à mains nues, course contre la montre) et qui est d'une nervosité dangereuse. Les scènes d'action sont très spectaculaires et McQuarrie est extraordinairement doué pour faire monter la tension jusqu'au bout pendant ces scènes et les rendre violentes.

Toutefois, il n'y a pas que la réalisation du réalisateur américain qui est à saluer ici. Son écriture est excellente également. L'intrigue est dense mais fluide. Elle implique plein de personnages et de partis différents, ce n'est cependant jamais confus. Et il y a tout un mystère autour du grand méchant de cet épisode qui fonctionne assez bien. Il y a un doute véritable qui s'installe. De plus, il y a des rebondissements forts qui surprennent réellement. Christopher McQuarrie a également trouvé une astuce pour montrer le désespoir et le côté extrême des péripéties, autrement que par les images. Pour cela, il passe par le dialogue. En effet, tous les protagonistes diront à un moment du film "I'm working on it." (se traduisant par "J'y travaille."). Cette réplique tombe très souvent au cours du récit, et majoritairement dans les plus mauvais moments qui soient, montrant ainsi à quel point tous les héros sont complètement dépassés par les événements et donnant une impression saisissante que la mission est vraiment impossible. Avec simplement quelques mots, McQuarrie donne un sentiment d'urgence à tout le récit, avant même que les contres-la-montres physiques ne commencent.

Mission Impossible : Fallout est l'un des meilleurs volets de la saga, pour toutes les raisons citées. Tom Cruise est toujours aussi extraordinaire, autant dans son jeu que dans ses performances physiques impressionnantes. Le reste du casting l'accompagne sans honte. Simon Pegg continue d'être un personnage comique efficace (les touches d'humour sont assez rares dans cet opus mais elles font mouche) et il se montre de plus en plus convaincant en mission sur le terrain. Ving Rhames regagne un peu d'importance alors que son personnage était de plus en plus effacé au profit des autres. Et Rebecca Ferguson est désormais la "Ethan Hunt Girl" officielle de la saga, autant pour son charme, sa sensibilité, son indépendance et sa ténacité. Henry Cavill et Sean Harris sont quant à eux des seconds rôles solides, chacun à sa manière. Pour ce qui est de la bande originale, Lorne Balfe succède à Joe Kraemer. Comme son prédécesseur, Balfe compose une musique qui ne remarque pas forcément au cours du visionnage et qui n'a pas de thème marquant autre que celui mythique de la saga, mais elle se montre pourtant tout aussi nerveuse et intense que le reste du long-métrage.
Il y a peu de sagas qui peuvent se vanter d'être toujours au top après six films. Non seulement la franchise Mission Impossible est toujours au top, mais en plus elle essaye constamment de faire encore mieux, d'aller toujours plus loin, de repousser les limites. Les films de cette saga ne sont pas estimés à leur juste valeur. Souvent considérés uniquement comme de bons films d'action, ils font pourtant partis de ce qui se fait de meilleur dans le genre actuellement. Toute la concurrence devrait en prendre de la graine.