Montanha fait partie des films qui dépeignent plus un état que des actions : c'est à ce titre qu'on ne trouvera pas de véritable fil conducteur narratif ici, mais plutôt une série de micro-tableaux illustrant une condition. Celle de David, un enfant de 14 ou 15 ans habitant à Lisbonne, et dont le grand-père est soudainement hospitalisé. On ne le verra jamais, sa maladie et sa mort imminente ne seront jamais vraiment explicitées et pourtant elles rôdent dans les parages pendant tout le film.


À travers la photographie extrêmement soignée du film, avec ses jeux d'ombre et de lumière vraiment envoûtants (à l'instar de l'introduction qui montre le corps alangui de l'adolescent torse nu sur son lit), la lenteur des journées de David est exacerbée. David, son ami Rafael, et la fille qu'ils convoitent tous les deux, Monica : voilà tout. Il y a bien une mère de passage suite aux événements, un père encore plus évanescent, mais tout semble graviter autour du trio d'enfants qui regarde le temps passer dans un état multiple, teinté de peur, de rage, et d'ennui.


Il y a de très beaux moments, comme celui des baisers, et d'autres beaucoup moins réussis, qui s'attardent vraiment trop sur des situations ne le méritant pas et conférant au film, dans ces passages, le statut de film auteurisant à l'excès. Le culte du silence est parfois un peu trop lourd, d'un point de vue cinématographique, mais le réalisateur parvient parfois à capter de très beaux regards, de très beaux silences dans la chaleur des intérieurs. João Salaviza aurait gagné à ne pas chercher systématiquement le singulier, et simplifier le tout (ce qui ne veut pas nécessairement dire épurer, justement). C'est une démarche à double tranchant, un peu ésotérique, parfois empreinte de vacuité, parfois de fascination.


La lumière du chef opérateur restera sans doute l'élément le plus important, un trait peut-être plus bouleversant que ce qu'est en train d'éprouver l'adolescent et le sujet du film rappelant à certains égards Antonioni... On passe ainsi un peu à côté de son univers, sa solitude, sa mélancolie, son bouillonnement intérieur.

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le 18 juil. 2018

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Morrinson

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