Par souci de suivre la mode Star Wars, James Bond se transforme en agent du cosmos en 1979 ; une véritable pignolade relevant plus de l'auto-parodie que du film d'espionnage à suspense, et qui amorçait la dégringolade des Bond de Roger Moore. Ian Fleming a dû se retourner dans son tombeau devant ces pitreries spacio-fantaisistes hors de propos de son héros. Il est clair que le départ de Richard Maibaum, scénariste des précédents opus, enlève à Bond ce qui faisait sa qualité et sa crédibilité.
Voyons ce qui va et ce qui ne va pas : pour la première fois, Albert Broccoli s'associe à une société de production française, une grande partie de l'équipe sera française, des acteurs français y auront des rôles secondaires, les intérieurs seront tournés pour la plupart dans les studios parisiens de Boulogne et d'Epinay, où Ken Adam conçoit les décors de la base d'Hugo Drax, tandis que les extérieurs du château de Vaux-le-Vicomte (à 60 km de Paris) serviront au domaine privé de Drax.
Hugo Drax, parlons-en, c'est l'un des meilleurs méchants de la franchise, interprété avec un flegme savoureux par le Français anglophile Michael Lonsdale, qui campe une sorte de néo-nazi de l'espace, malgré son utilisation au sein d'un scénario relevant plus d'un film de Claude Zidi que d'un Bond. Le retour de Requin (Jaws) suite à un abondant courrier d'enfants, est dans un premier temps bénéfique : plus indestructible que jamais, l'homme aux dents d'acier tombe d'un avion sans parachute, d'un téléphérique, et dévale les chutes d'Iguaçu au Brésil, le tout en époussetant son costume d'un revers de main. Mais le pire reste à venir avec ce personnage : il devient "gentil" à la fin du film, subjugué par le charme d'une petite femme blonde à lunettes.
Les scènes d'action sont assez nombreuses, mais étrangement, elles ne fascinent pas : la poursuite en hors-bord, l'attaque de Requin sur le téléphérique, la scène d'ouverture... on n'y croit pas. Le pire est sans doute la poursuite en gondole sur les canaux vénitiens ; le début est drôle avec la gondole-corbillard, mais ça confine au grotesque lorsque la gondole de Bond se transforme en overcraft et déboule sur la place Saint-Marc. On croit rêver, mais non, c'est bien un Bond !
La James Bond girl principale incarnée par Loïs Chiles, actrice découverte l'année précédente dans Mort sur le Nil, et qui ne refera rien de bien transcendant par la suite, est plutôt mignonne, mais elle ne laissera pas un souvenir mémorable aux fans. Quant à Roger Moore, il n'est plus qu'un débiteur de bons mots, il évolue nonchalamment dans un scénario abêti, et se retrouve dans l'espace, un endroit où il n'est pas à sa place. La dernière partie du film à ce sujet, est certes esthétique, mais absolument pas bondienne.
Voila donc comment on peut saborder une franchise à succès et un personnage mythique façonné amoureusement par Fleming. Malgré tout ça, on y trouve quelques trucs sympas et rigolos, d'où ma note très généreuse, et justement, le public qui est roi, fit un triomphe à Moonraker, allez comprendre...

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le 7 févr. 2017

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Ugly

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