Mosquito
6.2
Mosquito

Film de João Nuno Pinto (2020)

Une expérience sensorielle et hallucinatoire au coeur du Mozambique de la Première Guerre Mondiale

C’est le grand jour, enfin !


Les cinémas ouvrent leurs portes aux cinéphiles en manque qui, la bave aux lèvres, se ruent dans leur salle obscure préférée… Ne dérogeant pas à la règle, aussi accro qu’un Jared Leto dans Requiem for a dream, le choix de mon fix s’est porté sur Mosquito, deuxième long-métrage du portugais João Nuno Pinto.


Film historique de 2 heures relatant un chapitre de la Première Guerre Mondiale assez méconnu, le front au Mozambique où les forces armées portugaises viennent défendre leur colonie de la menace allemande, Mosquito est à n’en pas douter une œuvre de cinéma et une expérience tant sensorielle qu’hallucinatoire.


Nous suivons le parcours d’un jeune garçon de 17 ans, imberbe et de maigre consistance, qui en mal de reconnaissance aux yeux de ses parents décide de partir faire ses preuves au combat. Croyant rejoindre la France, c’est l’Afrique, ses immenses plaines, sa chaleur étouffante et sa splendide sauvagerie qu’il trouvera. Rapidement isolé de son unité, condamné à rester au camp, le soldat part seul à la suite de ses camarades, dans l’espoir qu’un délusoire courage fasse de lui l’homme qu’il a toujours rêvé d’être. Commence alors une quête initiatique aux confins de la folie, où l’être humain tutoie la bête et mène sa propre guerre.


« Je porte la guerre dans mon âme et la patrie dans mon cœur »


La véritable force du film est d’aborder la guerre sans jamais la montrer. Car oui, à travers cette angoissante solitude, le jeune homme va affronter toutes les horreurs du conflit et son absurdité. La caméra de Pinto se veut au plus près de son personnage, comme pour en capturer l’essence, sa moite frayeur. Avec de longs plans séquences, le réalisateur nous dévoile une nature aussi belle que dangereuse, qui à chaque pas du personnage semble l’envelopper un peu plus. A travers les bruits de la savane, c’est la bataille qui le ronge de l’intérieur qui s’exprime. Le parcours du garçon est ponctué de scènes hypnotiques, qui atteignent leur paroxysme lors d’une danse tribale dans un village de femmes. Si certains effets peuvent s’avérer artificiels dans la première partie du film, ils n’en deviennent que plus justes par la suite, superbement accompagnés par les nappes sonores de Justin Melland.


« T’as pas la moindre idée de ce qui t’attend »


Véritable critique du colonialisme et de l’asservissement du peuple noir, Mosquito réussit le pari de chercher l’humanité là où il n’y en a plus depuis longtemps ; le regard d’une jeune fille, les jeux d’enfants, un bain de mer… Des capsules où le temps se suspend, comme pour nous rappeler que toujours la vie continuera, quelles que soient les horreurs qui la traverseront.


Critique écrite pour le webzine Beware : https://www.bewaremag.com/film-mosquito-joao-nuno-pinto/

GabinVissouze
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le 23 juin 2020

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Gabin Vissouze

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