Craig s'en va James Bond reviendra

Au vu des retours critiques assassins qu'avait subi le film, y compris sur senscritique, je partais avec un a priori très négatif, surtout après le très dispensable SPECTRE. C'est un peu le problème des James Bond depuis Daniel Craig: c'est tout (Casino Royale, une grande partie de Skyfall) ou rien (Quantum of Solace, mais aussi la fin interminable de Skyfall sans reparler de Spectre).

Au final j'ai du coup été plutôt agréablement surpris par rapport à ce que je m'attendais à trouver. Bien sûr, le méchant est un prétexte, le fait qu'il porte un masque en début de film est sans intérêt et les motivations du tristement nommé Lyutsifer Shavin sont aussi peu lisibles qu'intéressantes. Le personnage est ici parce qu'il lui fallait exister, et rejoint donc la lignée des méchants oubliables, aux côtés de ceux des diamants sont éternels (le degré zéro du Blofeld), d'Octopussy ou de Quantum of Solace. Globalement la vengeance de Blofeld est bien mieux réussie, mais aucun des méchants ne convainc vraiment.
Mais l'intérêt du film n'est justement pas là, pas plus qu'il n'est dans ce remplacement en demi teinte de James Bond par Lashanna Lynch, qui aurait été avantageusement remplacée par sa collègue Paloma de la CIA puisqu'au fond, elle joue le même personnage, mais que contrairement à elle, elle ne suscite aucune sympathie particulière. La nouvelle titulaire du 007 a encore bien du travail...

Non, en réalité l'intérêt du film est de montrer qu'on peut être James Bond et avoir le sentiment qu'on est passé, toutes ces années, à côté de sa vie. L'idylle impossible avec Madeleine Swann agace certains? Peut-être, à titre personnel il ne me dérange pas et est bien approfondi. Il est vrai que depuis George Lazenby, James Bond n'avait jamais paru aussi fragile et sensible et que pour être rares dans la saga, ces moments sont explicables. Oui il est inhabituel de le voir s'occuper de quelqu'un d'autre que lui et d'avoir envie de le faire. Oui on est loin du Sean Connery triomphant, du Brosnan indestructible ou du Moore inébranlable. Oui le film a essayé de s'adapter aux nouvelles images qu'attendent de lui la société- des femmes fortes, des personnes issues de la diversité mises en avant (bon pour Q je ne vois pas l'apport scénaristique mais enfin), des héros qui doutent. Mais honnêtement ce n'est pas le premier Bond dans lequel ce dernier s'attache de façon appuyée à son Love Interest (cf. Tuer n'est pas jouer par exemple). Le rythme est soutenu, les trois heures passent à toute vitesse et les bonnes séquences d'action (si, si les sceptiques peuvent retourner regarder quantum of solace, ils verront que la franchise compte des scènes d'action plus contestables). Mention spéciale pour la scène d'action à Cuba, qui est très réussie et renoue le mieux avec l'esprit bondien. L'humour est aussi plus souvent de retour, après les débuts assez premiers degrés de l'ère Craig.

La fin aurait mérité d'être différente. Je comprends l'hommage à son prédécesseur au service secret de sa majesté. Rien ne la justifiait vraiment scenaristiquement ou ne la rendait inéluctable et puisque 007 n'est qu'un nombre, la conclusion aurait gagné à rester beaucoup plus ouverte.
Tant pis.
L'ère Craig se clôt sur cet opus. Contrairement à beaucoup, son Bond ne me manquera pas tant que ça, ayant personnellement une préférence pour les versions de Moore ou Brosnan. Mais cet épisode est loin d'être indigne du reste de la franchise et est à l'image de cette époque Craig, où le pire et le meilleur de la saga arrivent à se cotoyer.
Reste à savoir quand et comment James Bond reviendra.