Et il était temps...malheureusement. Et l'écrire me coûte tant Daniel Craig m'a fait aimer James Bond. Je vis cette fin comme un drame.
Car les temps de Casino Royal et Skyfall qui avaient rendu toutes ses lettres de noblesse à l’espion de l’Albion paraissent particulièrement loin. Même Quantum Of Solace pour qui j’ai une affection toute particulière parait loin.


La déception est à la hauteur de la surprise qu’avait été Casino Royal.


Les intrigues retorses, les jeux de dupes, les méchants charismatiques, tout le sel de James Bond a disparu. Le Chiffre, Vesper Lynd, Thiago Mendes / Raoul Silva, René Mathis, Félix...la saga a troqué une galerie de personnages charismatiques et profonds pour des Lyutsifer Safin et un Logan Ash insipides.


Mourir peut attendre s’est finalement peut-être trop fait attendre. L’attente a généré un vrai besoin de connaître le dernier souffle d’un Daniel Craig qui restera comme un James Bond incomparable par sa gueule, son physique et la manière dont il a transformé l’imagerie de 007.


Le titre avait pourtant tout pour plaire et commençons par rassurer les troupes : ce 25ème James Bond se regarde, quand même, avec un certain plaisir et les 2h43 se suivent avec une certaine facilité. L’opus installe un sentiment d’urgence constant qui rend le tout presque addictif. On conserve une photographie de très bonne qualité et certaines scènes sont particulièrement remarquables comme ce raid héroïque à travers une ancienne base militaire russe ou encore cette course-poursuite en pleine forêt scandinave. La partie à Cuba restera comme le meilleur moment du film.
James Bond est un bon film d’action.
On garde aussi avec plaisir un certain romantisme et un goût de la réplique piquante.
Le casting est qualitatif et conserve les forces des opus précédents (Felix, Q), mais aussi ses faiblesses (Christophe Waltz, Mallory) et ajoute quelques bons profils (Ana de Armas, d’ailleurs bien vite abandonnée…et Lashana Lynch). Rien de neuf.


Si James Bond est un bon film d’action, Mourir peut attendre est un James Bond très moyen.


Si Quantum Of Solace disposait d’une intrigue déjà faiblarde, ici, il n’y a strictement aucune intrigue. Aucune. Aucun personnage n’est travaillé pour nous emmener dans une intrigue labyrinthique comme pouvaient le faire Casino Royale, Skyfall ou les deniers Mission Impossible.
Cette absence enlève tout suspense et enjeu. J’ai eu l’impression de ne rien attendre du film car il n’avait aucun moyen de me surprendre. Il n’y a tout simplement aucun élément scénaristique en capacité de faire basculer le film dans une épopée palpitante. Et le sentiment d’urgence cache en fait le vide de ce que Mourir peut Attendre a à raconter.
Et c’est particulièrement tragique ! Car le tout sonne désespérément vide et même parfois faux. Il y a quelque chose de faussement intriguant chez Léa Seydoux, cette relation est faussement compliquée. Comme si, Mendes et Fukunaga avaient sans cesse cherché à recréer l’alchimie du duo Bond-Lynd.
La confrontation avec Lyutsifer Safin est...inintéressante. Son personnage est pauvre et Rami Malek ne donne que peu de profondeur à ce vengeur masqué que l’on découvre bien trop vite. L’artifice du masque, introduit pendant la scène d’ouverture autour de son personnage, n’a d’ailleurs aucun rôle.
Pourquoi un masque si ce dernier n’installe pas un inconnu pour le spectateur ? Pourquoi ? Pourquoi le personnage Logan Ash ? Pourquoi ? D'où 007 n'est qu'un chiffre ? Pourquoi Lyutsifer laisse Mathilde ?
...Ces choix vont me hanter ! Cette absence d'écriture me hantera.
Dire que Campbell avait fait d’un inhalateur l’un des objets centraux de l’intrigue d’un film...


Le coup de grâce est certainement la fin de ce James Bond, que je trouve...inqualifiable tant elle se confond en facilité. Il n’y a aucune nostalgie, aucune volonté de passer le témoin, cette fin est comme un abandon. Comme si après 2h40, Fukunaga en avait assez, et voulait plier le tout. C’est désespérant tant Daniel Craig a fait pour cette saga. Elle ne lui rend absolument pas hommage et en serait presque irrespectueuse.


Encore une fois, on refuse catégoriquement à Bond la possibilité d'avoir une vie après Bond.


Malgré sa présence historique au cinéma, la sage éprouve encore des difficultés avec la notion d'héritage. Le passage de témoin doit presque toujours être synonyme de rupture totale. Ce Mourir peut attendre était une vraie occasion, d'enfin, créer du lien.


Daniel Craig restera celui qui a fait passer James Bond dans le 21ème siècle avec fracas. Le chef-d’œuvre Casino Royal restera comme un modèle d’intrigue et de film mêlant espionnage, action et complot international. Daniel Craig est James Bond, le personnage lui allait si bien et il est rageant de la voir partir sur ce qui sonne comme une fausse note.
Daniel Craig avait installé un James Bond d’une rare violence, un James Bond profond agissant dans l’urgence, sans cesse en rupture, tant irrévérencieux que romantique. Plus humain que jamais, fait de cassures et de failles, Daniel Craig était un James Bond qu’on aimait voir en héros.


Un James Bond moderne, qui aurait mérité une fin au moins au niveau de ses accomplissements passés.


Il était Bond, James Bond. Merci Daniel.

Halifax
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le 5 oct. 2021

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